Les Blancs sont comme des fourmis qui rasent tout sur leur passage avec leurs mandibules.
Si vous n'avez pas au moins une chose à faire dans la vie, si vous ne savez pas qui vous êtes, ce que vous représentez, (…) vous disparaissez.
(Ethnies. Habiter le monde n°35-36)


Ainsi, les Indiens acceptent les chrétiens dès lors qu'ils ne portent pas atteinte à leur croyance et à leur mode de vie (…) Le « principal » de Texcoco don Carlos dénonce un christianisme à géométrie variable, en soulignant que les religieux leur interdisent d'avoir des concubines et de boire mais laissent les Espagnols agir comme cela.
... [le dominicain Duran] voit les Indiens comme au croisement de l’idolâtrie et du christianisme, croyant au mieux en Dieu mais mêlant tout cela d'anciennes croyances.
D'après les calculs de l'école de Berkeley, la Nouvelle-Espagne (sans le Yucatan) devait compter 25 millions d'habitants avant la Conquête dont 11 millions d'Indiens pour le Mexique central en 1519. C'est une estimation haute. La population indienne s'effondre au XVIème siècle décimée par les maladies:le Mexique central compte 6,4 millions d'Indiens en 1540, puis 4,4 millions en 1565. Les Espagnols ne sont que 57000 en 1570 au Mexique.
Les sorciers (…) les tlacatecolo (…), les « hommes-hiboux » (…) étaient redoutés car ils pouvaient se transformer en animal (…) Le chiffre neuf leur était favorable car il était associé aux divinités de la nuit, des enfers et des morts. (…) un prêtre du dieu Ometochli fréquente assidûment la place du marché de Tlaxcala. Des enfants qui quittent le couvent où ils ont écouté la bonne parole, s'inquiètent auprès des passants de cet étrange personnage et apprennent de qui il s'agit. Alors, ils le lapident. Les enfants, tout heureux de leur exploit, le rapportent aux religieux. Ceux-ci découvrent le corps de l'homme sous un amas de pierres.
On retrouve associé à cette victoire sur les Maures tous les ingrédients exaltant la victoire du roi d'Espagne. C'est donc aussi un message politique. Par ailleurs, les Indiens s'inscrivent désormais dans l'histoire de l'Espagne.
[Les encomenderos] se préoccupent davantage de leur rendement que de la construction d'une église (…) Ils font passer leurs intérêts avant l'évangélisation. (…) Ils contraignent aussi les Indiens à travailler le dimanche.
A la fin des années cinquante, les noms indiens se font rares. Pourtant, ce sont les mêmes hommes qui occupent les charges. Il se trouve tout simplement que les responsables indigènes ont troqué leur nom indien pour un nom espagnol.
(L'évangélisation des Indiens du Mexique. Eric Roulet. Presses Universitaires de Rennes 2008)


… la plus grande partie des revenus de l'évêque et des chanoines et des autres ministres de la cathédrale de Cuzco provient des dîmes perçues sur la vente de la cuca. Et de nombreux Espagnols se sont enrichis dans le commerce de cette plante.
(Les Incas Peuple du soleil. Carmen Bernand. Gallimard)


… les Espagnols, aussitôt, ils sont partis là-bas, à Cholula. Les accompagnaient les Tlaxcaltèques et les Tempoaltèques ; ils étaient armés pour la guerre. En arrivant, aussitôt, alors, on appela les gens, on convoqua les gens à grands cris, pour que viennent tous les seigneurs, les princes, les gouverneurs, les capitaines courageux et les hommes du peuple. On a ainsi rempli le parvis du temple.
Et, lorsque tous se furent rassemblés, aussitôt les Espagnols sont venus fermer les portes, de tous les côtés où l'on entre.
Aussitôt, alors, on a écrabouillé, on a assassiné, on a frappé. (…) Ce n'est pas avec des flèches, ce n'est pas avec des boucliers qu'ils [les Cholultèques] sont allés à la rencontre des Espagnols. Tout simplement, ils ont été massacrés par trahison ; tout simplement, ils ont été anéantis par fourberie ; tout simplement, sans le savoir ils ont été tués.
… lorsque déjà la fête se célébrait, lorsque déjà l'on dansait et déjà l'on chantait, lorsque déjà chant et danse se mêlaient, et que le chant était comme un vacarme de vagues brisées, alors, lorsqu'il sembla aux Espagnols que le moment était venu pour massacrer, aussitôt, alors, ils parurent. Ils étaient préparés pour la guerre. Ils sont arrivés pour fermer partout par où on pouvait sortir (…) Plus personne n'allait pouvoir sortir.
Et cela ainsi fait, aussitôt, alors, ils sont entrés dans la cour du temple pour massacrer les gens (…)
Aussitôt, alors, ils ont entouré ceux qui dansaient ; aussitôt, alors,ils sont allés là où étaient les tambourins ; aussitôt, ils ont frappé les mains du joueur de tambour, ils sont venus trancher les paumes de ses mains, toutes les deux ; ensuite, ils ont tranché son cou, et son cou est retombé au loin.
Aussitôt, alors, eux tous ont assailli les gens avec les lances en métal, et ils les ont frappés avec leurs épées en métal. Certains ont été tailladés par-derrière et aussitôt leurs boyaux se sont dispersés. A certains, ils ont fendu la tête en morceaux, ils leur ont broyé la tête, ils ont réduit en poudre leur tête. Et, d'autres' ils les ont frappés aux épaules, ils ont venus trouer, ils sont venus fendre leurs corps. A d'autres, ils leur ont frappé à plusieurs reprises les jarrets ; à d'autres, ils leur ont frappé à plusieurs reprises les cuisses ; à d'autres, ils leur ont frappé le ventre, et aussitôt tous leurs boyaux se sont dispersés.
Et c'est en vain qu'alors, on courait. On ne faisait que marcher à quatre pattes en traînant ses entrailles ; c'était comme si on s'y prenait les pieds lorsque l'on voulait s'enfuir. On ne pouvait aller nulle part. Et certains qui voulaient sortir, ils venaient les frapper là, ils venaient les larder de coups.
(…) Mais les Espagnols allaient partout, (…) partout ils lançaient des coups en cherchant, au cas où quelqu'un se serait réfugié là-bas ; partout ils ont été, ils ont été gratter partout…
Et tout ceci nous est arrivé.
Nous l'avons vu,
nous l'avons admiré.
Avec ce lamentable, ce pitoyable sort
nous avons enduré l'angoisse.
Sur les chemins gisent les flèches brisées,
les cheveux sont épars.
Les maisons ont perdu leurs toits,
les maisons sont devenues rouges.
La vermine grouille dans les rues et les places,
et contre les maisons les cervelles ont fait des éclaboussures
Les eaux sont comme rouges, elles sont comme teintes,
et, quand nous les avons bues,
on buvait de l'eau de salpêtre.
Et nous avons bu, alors, cette eau de salpêtre.
Nous avons frappé, alors, les murs de brique,
et notre héritage n'était plus qu'un trou.
Les boucliers ont pu nous protéger,
mais on a voulu en vain peupler la solitude
avec des boucliers.
Nous avons mangé le bois coloré du tzompantli,
nous avons mâché le chiendent, des lézards,
des souris, de la poussière de crépi,
et de la vermine.
Nous avons dévoré ensemble la viande,
quand elle venait d'être posée sur le feu.
Quand la viande était cuite,
ils l'arrachaient de là,
dans le feu même, ils la mangeaient.

On fixa notre prix.
On fixa le prix du jeune homme, du prêtre,
de la jeune fille et de l'enfant.
Assez ! Le prix d'un homme du peuple
atteignait à peine deux poignées de maïs,
il n'était que de dix galettes de mouche ;
notre prix n'était que de
vingt galettes de chiendent du matron.

L'or, le jade, les mantes en coton,
les plumes de quetzal,
tout ce qui est précieux
ne fut compté pour rien.
C'est alors qu'ils ont brûlé les pieds à Quauhtemoc. Lorsque le jour fut venu, ils sont venus l'amener, ils sont venus l'attacher à un arbre…
Là-bas ils ont pendu le souverain de Uitzilopochco, Macuilxochitzin. Aussitôt, ensuite, le souverain de Colhuacan, Pitzotzin. Tous les deux furent pendus là-bas. Et le tlacateccatl de Quauhtitlan, et le tliiiancalqui, ils les ont fait dévorer par les chiens. Puis, ensuite, des gens de Xochimilco ont été aussi livrés aux chiens pour être dévorés, et Ecamextlatzin de Texcoco a été livré aux chiens pour être dévoré. Ils étaient tout simplement venus s'arrêter ici, personne ne les avait accompagnés, ils avaient uniquement amené leurs livres de peinture. (…)
Et, lorsque les Espagnols sont arrivés à Coyoacan, alors, de là ils se sont répandus partout, dans toutes les cités. Aussitôt, alors, on a donné des gens du peuple, partout, dans toutes les cités. C'est alors que l'on a fait des dons de gens, c'est alors que les gens du peuple ont été livrés.
Et un jour apparut le cadavre du malheureux Cacama, dernier roi et héritier direct de l'empire chichimecatl, n'ayant pas encore atteint sa vingt-cinquième année et gentil. [Après qu'il a été reçu par Cortès]
… [ce fut qu']au quart de l'aube, on trouva mort le malheureux Motecuhzoma (…) on lui avait plongé l'épée par le fondement.
Après leur grande victoire et la prise de Cholula, les Espagnols et les Tlaxcaltèques, qui par miséricorde ne rasèrent pas complètement la ville, continuèrent leur route vers Mexico.
C'est alors que (…) Pedro de Alvarado ordonna (…) à dix autres [soldats] qu'ils se rendissent là où se trouvaient ceux qui jouaient du tambour et où, à son avis, étaient rassemblés les gens les plus illustres, et qu'ils tuassent celui qui jouait du tambour et tous ceux qui l'entouraient. Ce que firent immédiatement ces « prêcheurs de l'Evangile de Jésus-Christ » ou, pour le dire mieux, ces « disciples de l'iniquité », et, s'élançant contre ces infortunés, démunis, à moitié nus, ne portant sur la peau qu'une étoffe de coton, n'ayant aux mains que roses et plumes avec lesquels ils dansaient, ils les poignardèrent tous. Et ceux qui, à la vue de ce spectacle, voulaient fuir, étaient tués par les soldats qui gardaient les portes. De sorte que, voulant se réfugier et se cacher dans les habitations pour échapper à ces ministres du démon, ils furent tous massacrés et la cour se couvrit du sang de ces malheureux, de boyaux, de têtes, de mains et de pieds coupés, alors que d'autres avaient les entrailles fouillées par les couteaux et les glaives (…)
Il se produisit un tel tumulte et la clameur de la ville fut si énorme, et si grand le hurlement des femmes et des enfants, que les montagnes résonnèrent et les pierres se fendirent de douleur et de pitié, en voyant huit ou dix mille seigneurs, qui constituait la noblesse de Mexico, morts et dépecés dans la cour du temple, sans avoir rien fait ni commis qui le justifiât et, bien au contraire, pour leur [aux Espagnols] avoir donné leurs biens et leurs propriétés et leur avoir fourni nourriture et boisson en abondance…
Et l'on dit que c'est à ce moment-là que quelques capitaines, entendant les clameurs et les pleurs des femmes et des enfants et le tumulte et les hurlements de la ville, commencèrent à réciter la romance qui dit :
Néron, de la Roche Tarpéiènne,
regardait brûler Rome.
Les enfants et les vieillards pleuraient
et, lui, se grisait de l'arôme…, etc.
Et, tout cela, je l'ai trouvé dans un traité qui faisait référence à ce massacre comme à la plus atroce des barbaries commises sur cette terre, car la fleur et la noblesse de Mexico y trouva la mort ainsi que tant et tant d'hommes illustres et valeureux.
On perdit, au cours de cette sortie, de grandes richesses en or et en pierres précieuses, qui provenaient du trésor de Motecuhzoma. Après la mort de ce dernier, Cortès en fit fondre la plus grande partie, car les pièces et les bijoux d'or ouvragé occupaient un trop important volume et il valait mieux les transformer en barres et lingots. C'est ainsi que patènes, bracelets, colliers et pendentifs furent fondus et vinrent s'ajouter aux lingots déjà existants, qui représentaient une immense fortune.
… nous allons tous être tués et détruits par ces dieux [les Espagnols] et(…) les survivants deviendront leurs esclaves et leurs vassaux. Ils vont s'emparer du royaume et je suis le dernier roi de cette nation sur cette terre [Motecuhzoma], car, même si certains de nos fils et de nos parents deviennent gouverneurs ou reçoivent l'administration d'une province, ils ne seront en vérité ni rois, ni princes, mais de simples prévôts chargés de collecter les charges et les tributs, (…) et se contenteront d'obéir à leurs ordres.
… les Espagnols commencèrent à chercher le trésor (…) Le Marquis eut beau jeter des Indiens aux flammes, d'autres aux chiens et pendre les troisièmes pour qu'ils lui révélassent le secret, personne n'a pu découvrir...
(La Conquête. Récits aztèques. Georges Baudet et Tzvetan Todorov. Seuil 1983)


Si les chrétiens ont tué et détruit tant et tant d'âmes et de telle qualité, c'est seulement dans le but d'avoir de l'or, de se gonfler de richesses en très peu de temps et de s'élever à de hautes positions disproportionnées à leur personne.
(Très brève relation de la destruction des Indes. Bartolomé de las Casas. 1552)


Le dieu unique est cohérent. Il est le modèle de ce qu'il exige de chaque fidèle (…) les guerriers ne peuvent plus être que des croisés au service de la religion.
(Mythes et dieux des Indo-Européens. Georges Dumézil. Flammarion)


Bientôt on braqua les Hotchkiss sur le campement, on ouvrit le feu et une pluie de projectiles s'abattit sur les femmes et les enfants qui s'étaient massés devant les tentes pour observer ce qu'ils croyaient n'être qu'une parade militaire inusitée. Les pièces crachaient des obus de deux livres à raison de cinquante à la minute, fauchant tous les survivants. Une femme, dite Tourbillon bleu, qui survécut au massacre, reçut quatorze blessures. (…) Les rares Indiens qui survécurent, une poignée à peine, s'enfuirent saisis de panique se cacher dans une gorge du voisinage, poursuivis par des centaines de soldats en démence et sous le feu des canons qui avaient été braqués dans la direction de la gorge. La poursuite se termina en massacre. Bien après que la résistance avait cessé et que tous les guerriers étaient étendus sur le sol, morts ou agonisant, on abattait encore des femmes tenant dans les bras leurs enfants.
C'était le triomphe de l'homme blanc.
(La civilisation indienne. P Radin. Payot 1953)


… des centaines et des milliers d'enfants guaharibos sont partis travailler comme esclaves chez les Hollandais de la Guyane au XVIIème et XVIIIème siècles. Mais là, ils ont cessé d'être des Guaharibos. Ils n'ont plus été que des hommes enchaînés, travaillant jusqu'à leur mort sans ouvrir la bouche.
(L'expédition Orénoque Amazone. Alain Gheerbrant. Gallimard 1952)


… du fameux Requerimiento (mise en demeure), espèce de sommation officielle et passablement hypocrite, qui laissait aux Indiens la soi-disant liberté de choisir leur destin : se soumettre et devenir sujets -et protégés- de Sa Majesté, ou s'exposer à l'extermination ou l'esclavage.
(Relation et commentaires du gouverneur Alvar Nunez Cabeza de Vaca sur les deux expéditions qu'il fit aux Indes. Mercure de France 1980)


« Il ne faisait pas bon voir les femmes et les enfants morts ou blessés. (…) Les enfants blessés hurlaient de douleur (…) racontait Yellow Wolf. » (…) cinquante à soixante femmes, enfants et vieillards non-combattants avaient été tués ce matin-là, ou ne tarderaient pas à mourir de leur blessure (…) « Rares sont ceux qui oublieront un jour les cris de deuil mêlés de rage et d'horreur venus du camp à quatre ou cinq cent mètres de nous, quand les Indiens y sont rentrés et ont reconnu leurs guerriers, leurs femmes et les enfants massacrés. »
« Vous savez ce qu'on éprouve quand on perd des parents, des amis morts de maladie. Peu vous importe alors de mourir. Pour nous, c'était bien pire. Des hommes vigoureux, des femmes en pleine santé et des petits enfants étaient morts et enterrés. Ils n'avaient rien fait de mal pour être tués de la sorte. Nous n'avions demandé qu'à rester chez nous, sur la terre de nos ancêtres. »
(E Wy Tone My)
« Nous étions des vagabonds de la prairie. Et pourquoi ? Pour satisfaire la cupidité de l'homme blanc. L'homme blanc convoitait les richesses des nôtres ; il les a obtenues en anéantissant notre peuple. »
(White Bird)
… au plus fort de l'été 1878, les Nez-percés furent entassés dans des wagons de marchandises pour être conduits sur une réserve indienne au sud du Kansas. (Six enfants moururent de chaleur pendant le transport) (…).
« Tous les nouveaux-nés mouraient, et beaucoup de vieillards. » (Yellow Wolf)
On pense qu'une centaine d'enfants nez-percés seraient morts en Oklahoma où, selon le témoignage des médecins de passage, la mortalité infantile atteignait cent pour cent.
(Ne vends jamais les os de ton père. Brian Schofield. Albin Michel 2013)


De dix mille à la fin du XVIIIème siècle, cette nation puissante passa à deux mille individus en 1876 (…). Sa survie était compromise quand, à la fin du XIXème siècle, exilée en Oklahoma, déracinée et privée de terre, elle ne comptait plus que quelques centaines de membres.
Nous parlons de notre liberté perdue.
(Pawnee (vie de Fils de l'Ours). Giovanni Michel des Franco. Le chant des hommes 2012)


Les Indiens connaissaient bien la façon dont les Blancs parvenaient à les entraîner à faire des choses qu'ensuite ils regrettaient. Les Indiens libres et ceux des réserves communiquaient sans cesse. Ils savaient bien comment leurs frères des agences étaient dupés.
Les Robes Noires étaient les meilleurs amis de Sitting Bull lorsqu'il était libre dans les plaines, mais lorsqu'il s'est rendu à l'agence, ils ont été les premiers à se retourner contre lui.
Nous autres Indiens sommes un îlot perdu au milieu d'un lac d'hommes blancs. Nous devons être solidaires, ou ils vont nous anéantir les uns après les autres.
D'une façon ou d'une autre, tous les hommes exceptionnels de la nation sioux furent « éliminés » après avoir fait la paix avec l'homme blanc.
« Dès 1882, le Bureau des Affaires Indiennes mena continuellement une gestion des plus ignobles… Ce peuple intelligent et brillant fut écrasé, réprimé, déporté d'un lieu à un autre. On a abusé de lui, on lui a menti. Ses enfants se virent installés dans les moins bonnes écoles... » (Lieutenant-colonel George P Abern)
(Sitting Bull. Stanley Vestal. Editions du Rocher 1992)


Le Texas n'a jamais appartenu aux Américains : c'était un territoire comanche! La nation comanche est une nation qui bouge, qui unit, qui s'approprie la terre en la parcourant.
(Christophe et son œuf. Carlos Fuentes. Gallimard 1990)


D’après une tradition du pays de la Hague (Manche), on disait autrefois des messes à gravage (naufrage) dans plusieurs églises de la région. Boucher de Perthes rapporte que dans le nord du Finistère, vers 1820, des gens faisaient célébrer une messe pour que l’année fût heureuse en naufrages, et qu’on les avait vus parcourir processionnellement le rivage en chantant les litanies pour obtenir la même faveur.
Les matelots qui, après le naufrage, arrivaient à terre, étaient pris, dépouillés, massacrés ou précipités dans les flots, et les débris des navires étaient emportés par les riverains.
... les ennemis tombent sous ses coups comme les épis sous la faux et la victoire reste aux chrétiens.
L'évêque Saint Faron ayant accordé à Saint Fiacre toute l'étendue de la forêt qu'il pourrait, à lui seul, bêcher en un jour, celui-ci commença à ouvrir la terre avec une bêche, et voilà qu'à sa seule présence les arbres s'abattaient d'eux-mêmes pour agrandir la concession.
(Croyances, mythes et légendes des pays de France. Paul Sébillot. Omnibus août 2002)


Il nous faut éveiller des envies en lui. Dans sa morne sauvagerie, il doit être touché par les ailes de l'ange divin de l'insatisfaction.
(Ne vends jamais les os de ton père. Brian Schofield. Albin Michel 2013)


Vous avez ramassé ce qui appartenait aux soldats. Vous allez dorénavant convoiter les biens de l'homme blanc. Vous vous mettez à sa merci et il vous affamera de cette façon.
(Sitting Bull. Stanley Vestal. Editions du Rocher 1992)


J'ai souvent voyagé en avion au-dessus de la forêt et je n'ai vu sur ses bords que des arbres morts dont même les graines enfouies dans le sol ont été tuées par le feu. J'ai vu la terre des Blancs s'étendre au loin, découpée de toutes parts et couverte de mauvaises herbes rases. Il n'y a aucun feuillage et le sol n'y sera bientôt que du sable. Pourtant les Blancs n'entendent pas nos paroles. Ils ne songent qu'à rendre notre terre aussi nue et brûlante que la savane qui entoure la ville de Boa Vista. C'est là leur seule pensée à propos de la forêt. Ils croient sans doute que rien ne peut l'épuiser. Ils se trompent. (…) Sa lisière porte les marques de déboisement et de feu des colons et des éleveurs et son centre celles de la boue des orpailleurs. Tous la dévastent avec avidité comme s'ils voulaient la dévorer. Les chamans voient bien qu'elle souffre et qu'elle est malade. Nous craignons qu'elle ne finisse par retourner au chaos en anéantissant les êtres humains, comme cela est arrivé autrefois. Nos esprits xapiri sont très inquiets d'observer la terre devenue spectre. Ils reviennent de leurs vols lointains en pleurant ses blessures dans leurs chants. J'ai souvent entendu leurs voix se lamenter alors qu'ils emmenaient mon image dans les lointains pour me montrer cette dévastation. (…) La pensée des Blancs est pleine d'ignorance. Ils ne cessent que saccager la terre où ils vivent et de transformer les eaux qu'ils boivent en bourbier !
J'observais d'un côté, la beauté de notre forêt et, de l'autre, la terre des Blancs, ravagée et couverte de dessins et d'entailles, comme une vieille peau de papier déchiré. (…) les endroits où les Blancs fabriquent leurs machines et leurs moteurs sur des terres aux eaux souillées, pleines de vacarme et de fumées d'épidémies.
A New York (…) je me suis dit aussi, en séjournant dans cette ville, que les Blancs qui l'avaient édifiée avaient maltraité les premiers habitants de ces contrées de la même façon que ceux du Brésil aujourd'hui. Leur terre était belle, fertile et giboyeuse. (…) « Nous allons en terminer avec ces Indiens sales et paresseux! Nous allons prendre leur place sur cette terre ! Nous serons les vrais Américains car nous sommes blancs ! Nous sommes vraiment ingénieux, travailleurs et puissants ! »
Les Blancs, eux, anéantissent le gibier avec leurs fusils ou le mettent en fuite avec leurs machines. Ensuite, ils brûlent les arbres pour y planter de l'herbe. Puis, lorsque la richesse de la forêt a disparu et que l'herbe elle-même ne repousse plus, ils doivent s'en aller ailleurs pour nourrir leur bétail affamé.
Nous ne voulons pas que notre forêt soit dévastée et que les Blancs finissent par ne nous céder que de petits morceaux épars de ce qu'il restera de notre propre terre ! Dans ces rebuts de forêt malade aux rivières boueuses, il n'y aura bientôt plus de gibier ni de poissons, plus de vent ni de fraîcheur. (…) Je ne veux pas que les miens habitent un reste de forêt, ni que nous devenions des restes d'êtres humains.
(La chute du ciel. Davi Kopenawa. Plon 2010)


… les croyants, en une réaction spectaculaire à cette dynamisation incessante du paysage social, matériel et spirituel, deviennent franchement «fondamentalistes» pour acquérir une position solide et durable face au monde. Si des auteurs (…) observent une tendance croissante à l' « épuisement » de l'être dans la modernité tardive (…), cela, selon moi, est largement (…) attribuable à une lutte pour la reconnaissance qui (…) recommence encore et encore chaque jour, et dans laquelle aucune niche ni aucun palier sûrs ne peuvent plus être atteints. (…) elle continue à menacer les sujets d'une constante insécurité, de forts taux de hasard et d'un sens croissant de l'inutilité. Souffrir de la non-reconnaissance est la conséquence du fait de rester en arrière, en retrait ; (…) dès qu'un bébé naît, les parents deviennent paranoïaques, en proie à la peur qu'il sera peut-être « attardé » d'une manière ou d'une autre.
… les logiques de la compétition et de l'accélération n'ont pas de freins ou de limites internes : elles mobilisent d'immenses énergies individuelles et sociales mais, au bout du compte, elles les aspirent jusqu'à la dernière goutte. Logiquement, il n'y a aucune autre issue à cette évolution que le sacrifice de toutes les énergies individuelles et politiques à la machine de l'accélération, symbolisée par la roue des hamsters de la compétition socio-économique.
… l'aliénation peut émerger (…) à chaque fois que nous faisons «volontairement» ce que nous ne voulons pas vraiment faire.
(Aliénation et accélération. Hartmut Rosa. La Découverte 2012)


En premier lieu, que c'est leur coutume, celle de leurs ancêtres qu'il faut chérir, d'autant que grâce à elle leurs aïeux ont été heureux. Que depuis le moment où les Russes sont venus au devant d'eux pour commercer et les évangélisateurs pour répandre leur foi chrétienne, les malheurs ont frappé plus durement leur terre, des maladies sont apparues qui étaient alors inconnues de leurs ancêtres, les gens ont commencé à s'appauvrir, le gibier et le poisson à diminuer.
(Le chagrin de l'ours. Dominique Samson Normand de Chambourg. Indiens de tous pays 2010)


J'errais. J'étais semblable à une particule de terre. J'avais été dépouillé de tout, excepté de moi-même.
Les gens dansaient, entrant en transe, jusqu'à ce qu'ils voient leurs parents défunts. Ils ont été massacrés à Wounded Knee et leur rêve s'est éteint sous le souffle des mitrailleuses Gatling. Les rêves sont dangereux pour le monde de la peau de grenouille qui les tient constamment en joue.
… les soldats massacraient le peuple de Big Foot. Ils les ont tous tués, hommes, femmes et enfants. (…) Ils ont laissé les corps là, sur le sol, geler toute la nuit, des bras et des jambes se dressaient dans toutes les directions. Au matin, ils les ont entassés dans des chariots, puis ils ont creusé une longue fosse, ils les ont jeté dedans et remis la terre dessus.
(De mémoire indienne. Lame Deer et Jean-Jacques Roudière. 2009)


Les nihilistes, aujourd'hui, sont sur les trônes. Les pensées qui prétendent mener notre monde (…) sont devenues en réalité des idéologies de consentement, non de révolte. Voilà pourquoi notre temps est celui des techniques privées et publiques d'anéantissement.
(L'homme révolté. Albert Camus. Folio 1951)


En 1871, le bison parcourait encore les plaines : quelques mois plus tôt, un troupeau de quatre millions de têtes avait été repéré près de l'Arkansas River, dans le sud de l'actuel Kansas. Le groupe principal faisait quatre-vingts kilomètres de long sur quarante de large. Mais le massacre avait déjà commencé et tournerait rapidement à la destruction la plus importante d'animaux à sang chaud de l'histoire de l'humanité. Dans le seul Kansas, entre 1868 et 1881, les os de trente-et-un millions de bisons furent vendus comme fertilisant.
Au centre du Mexique, en 1520, un an après l'accostage des galions d'Hernan Cortès, on comptait onze millions d'Indiens. En 1650, ils n'étaient déjà plus qu'un million. (…) l'assimilation de ces Indiens passait malheureusement par leur quasi-extermination. A la fin du XVIème siècle, après cinquante années de combats intermittents, les Chichimèques disparurent de la surface de la Terre.
[Les Cherokees] faisaient partie des « Cinq tribus civilisées » (…). Pour se débarrasser d'eux, on les accusa d'avoir participé à un complot soutenu par les Mexicains pour chasser les Blancs du Texas. C'était très certainement faux (…). Le 15 juillet 1839, ils prirent d'assaut un village cherokee. Le lendemain, ils piégèrent cinq cents d'entre eux dans une zone de marécages et de fourrés épais, puis tuèrent la plupart des hommes, y compris le chef Bowles. Deux jours plus tard, les soldats brûlèrent les villages, les maisons et les champs.
Seules deux tribus, les Alabamas et les Coushattas, furent autorisées à rester – mais elles durent abandonner leurs champs fertiles pour des terres bien moins riches. C'est ainsi que des dizaines de milliers d'hectares de superbes terres agricoles de l'est du Texas furent mises à la disposition des fermiers blancs…
… ils attaquèrent le village cheyenne du chef Black Kettle qui venait pourtant de conclure une trêve avec les soldats blancs. (…) Il commença par écraser les tipis sous les obus à fragmentation (…) environ six cents Cheyennes étaient sur le campement. Pas plus de trente-cinq étaient des guerriers. La plupart des hommes étaient partis chasser le bison. (…) Les enfants furent exécutés, à bout portant. Les bébés transpercés à la baïonnette. Des Indiens s'entassèrent autour d'un grand drapeau américain (…) brandirent des drapeaux blancs (…). Mais ils furent abattus (…) on dénombra trois cents cadavres de Cheyennes. Tous furent scalpés et un grand nombre mutilés.
… de simples fermiers empreints d'une éthique du travail calviniste (…). On disait qu'ils craignaient tellement Dieu que rien ni personne d'autre ne pouvait les effrayer. Ils étaient tellement convaincus que la terre leur appartenait qu'ils refusaient le plus souvent de respecter les traités signés entre le gouvernement et les Amérindiens. Ils vouaient d'ailleurs une haine féroce aux Indiens, qu'ils considéraient comme des sous-hommes ne possédant aucun droit inaliénable sur quoi que ce soit.
… les troupes de Mackenzie (…) chargèrent un village comanche (…). Le campement prit rapidement des allures de stand de tir. L'un des officiers (…) parla d'« un escadron aligné sur une scène tirant dans la fosse bondée d'un théâtre ». Un grand nombre d'Indiens finirent dans un étang (…) mais la plupart étaient morts. « Il y eut tant d'Indiens tués ou blessés dans l'eau qu'elle était rouge de sang », écrivit un captif blanc nommé Clinton Smith qui combattit aux côtés des Comanches. (…) « les tipis furent le plus souvent brûlés et un très grand nombre de biens détruits » (Mackenzie). (…)
« Nous sommes arrivés le lendemain du combat et avons trouvé des cadavres éparpillés. Je me rappelle avoir découvert le corps de Batsena, un très brave guerrier, massacré et scalpé, et à côté de lui, les restes horriblement mutilés de sa fille, Nooki, une belle jeune squaw, qui avait été éventrée et scalpée. Les corps offraient un spectacle écoeurant. » (Herman Lehmann) (…)
« Pendant longtemps, toutes les nuits, j'ai entendu les vieilles femmes pleurer leurs morts à l'extérieur du campement. Elles se lacéraient avec des couteaux, et lorsqu'elles rentraient, leur visage, leurs bras et leur poitrine arboraient les traces des mutilations qu'elles s'étaient infligées dans leur terrible souffrance. » (Clinton Smith)
Il n'y aurait plus de refuge sur la réserve, plus d'indulgence pour ceux qui refusaient de s'y installer. (…) les Tuniques Bleues devaient désormais « soumettre tous les Indiens qui résistaient à l'autorité constituée. »
… toute la puissance de l'armée de l'Ouest finit par être mobilisée pour traquer, affronter, et détruire ce qu'il restait de tribus nomades. Sheridan voulait harceler les Indiens (…). Il les affamerait. Leurs villages seraient dénichés et incendiés, leurs chevaux confisqués. Ils ne bénéficieraient d'aucun répit, d'aucune liberté de chasser.
« Ils détruisent l'intendance des Indiens… Si vous souhaitez une paix durable, laissez-les tuer, écorcher et vendre jusqu'au dernier bison. Vos prairies se couvriront alors de bétail tacheté et de joyeux cow-boys. » (Général Phil Sheridan)
La destruction des ressources alimentaires des Indiens n'était pas accidentelle, c'était un acte politique délibéré.
… la fin de la domination des tribus équestres signifiait la fin de la notion même d'espace illimité (…) et le début de l'Ouest nouveau, qui serait mesuré, divisé, subdivisé et apprivoisé, d'abord par les éleveurs de bétail, puis par tous les autres. En l'espace de quelques années, les fils barbelés couvriraient toute l'étendue des Plaines.
Quelles histoires pourraient-ils raconter à leurs enfants et à leurs petits-enfants s'ils passaient leur temps sur la réserve à attendre qu'on leur donne à manger ? (…) Entre 1868 et 1881, ces Blancs (…) abattraient trente et un millions de bêtes, dépouillant presque entièrement les Plaines de ces énormes créatures (…) et détruisant le dernier espoir de voir un jour une tribu nomade renouer avec sa vie traditionnelle. Un Indien à cheval n'avait aucun sens sans troupeau de bisons. Il n'avait aucune identité.
« De ce vaste pays que nos ancêtres ont parcouru, libres et heureux, durant des siècles sans contestation, que nous reste-t-il ? Le gibier, dont nous dépendons principalement, est tué et pourchassé, et nous sommes contraints d'occuper ses régions les plus stériles et arides où nous mourons de faim. Nous n'avons plus que l'extermination comme horizon et nous attendons le résultat dans une totale indifférence. Donnez-nous un pays que nous pouvons considérer comme le nôtre, où nous pouvons enterrer nos proches en paix. » (Ketumseh)
Il avait perdu tous les chevaux qui faisaient sa richesse. L'abattage ou la dispersion des troupeaux comanches faisait partie du plan de destruction économique et militaire de la tribu mis en place par les Blancs.
A présent, toute perspective de retour à leur ancienne vie, même momentanée, était écartée. Les bisons étaient tous morts et l'homme blanc possédait les canyons sacrés.
« Je suis né dans la prairie, là où le vent soufflait librement et où rien n'arrêtait la lumière du soleil. Là où je suis né, il n'y avait pas de clôture et tout respirait librement. C'est là que je veux mourir, pas entre quatre murs. Je connais le moindre ruisseau, le moindre bosquet entre le rio Grande et l'Arkansas. (…) Les Texans se sont emparés des terres où l'herbe est la plus dense et le bois le meilleur. (…) Mais il est trop tard. Les Blancs possèdent le pays que nous aimions, et tout ce que nous désirons, c'est parcourir la prairie jusqu'à notre mort. » (Ten Bears)
(L'empire de la lune d'été. SC Gwynne. Albin Michel 2012)


J'ai été choqué d'entendre le président de Goldman Sachs affirmer, devant la commission d'enquête du Sénat américain : Dieu n'a pas bien fait son travail, alors je fais le travail de Dieu.
(Goldman Sachs : la banque qui dirige le monde. J Fritel M Roche. Arte 2012)


Si le but était le progrès de la civilisation, il est à supposer qu'il existe pour répandre la civilisation d'autres voies, plus conformes à ce but, que l'extermination des hommes et la destruction de leurs richesses.
Le but, c'est le meurtre ; les moyens : l'espionnage, la trahison, la ruine des habitants, le pillage, le vol (…), la tromperie et le mensonge (…) ; les mœurs de la classe militaire ?- L'absence de liberté, c'est-à-dire la discipline, l'oisiveté, l'ignorance, la cruauté, la débauche, l'ivrognerie. (…) on tue, on mutile des dizaines de milliers d'hommes et ensuite on célèbre des services d'actions de grâce pour avoir tué beaucoup de gens (…), et on proclame sa victoire, considérant que plus on a massacré de gens, plus le mérite est grand. (…) Je vois que je commence à comprendre trop de choses. Et il ne convient pas à l'homme de goûter des fruits de l'arbre de la science du bien et du mal.
(La guerre et la paix II. Tolstoï. Folio 1972)


Les païens arrachés à la forêt étaient placés en tutelle chez une famille chrétienne qui devait les initier à une vie plus « rationnelle » ; naturellement ces protecteurs ne se faisaient pas scrupule de les exploiter dans la mesure du possible.
(Ecrits d'Amazonie. Alfred Métraux. CNRS Editions 2013)


« Ils nous ont fait beaucoup de promesses, plus que je ne peux me rappeler, mais ils n'en ont jamais tenu qu'une seule ; ils avaient promis de prendre nos terres, et ils les ont prises. » (Red Cloud)
On estime que les Amérindiens étaient cent mille entre le VIIème et le Xème siècle. Puis à l'arrivée des premiers européens, la population amérindienne a chuté en Guyane pour atteindre trente mille personnes.
« Les tribus de l'Oyapock, estimées à près de 15000 personnes en 1675, ont pratiquement été anéanties en un siècle et demi. » (Jean-Marcel Hurault)
« Ce qui flatte le plus particulièrement les Indiens est la boisson, que l'on épargne trop ici, à laquelle cependant il ne serait pas mal de les accoutumer, ainsi qu'à l'usage de toutes les choses d'une grande consommation qui multiplient leurs besoins et les mettent dans le cas de ne pouvoir se passer de nous. » (Fiedmont, gouverneur, 1767)
« La pollution des rivières, si essentielles dans le mode de vie des habitants, est indescriptible. (…) La situation demeure intolérable. » (Chantal Berthelot. 2009)
Le fleuve est devenu méconnaissable. La situation est devenue dramatique pour toutes les populations qui vivent aux abords du fleuve. (…) Il est maintenant devenu impossible de boire l'eau, de se baigner et de se laver.
… 84 % du peuple Wayana est contaminé par le mercure au-dessus des normes maximales de l'OMS.
« … les Amérindiens s'en foutent, parce qu'on sait qu'on est en voie de disparition et que notre culture est en danger. On pense que l'espoir est perdu (…) vous êtes en train de nous détruire avec vos produits, avec tout. » (Apaïkasi Nanuk)
« 70 % des enfants amérindiens de moins de trois ans présentent un taux d'imprégnation au mercure cinq fois supérieur aux normes de l'EFSA (…) et dix fois supérieur à la moyenne mondiale. » (Christiane Taubira)
La prévalence du suicide sur le territoire y est (…) dix-sept fois plus élevé qu'en France métropolitaine.
« On a le sentiment qu'on est dans une société qui est complètement acculée et où il n'y a plus d'issue, pas de liberté de choix, et donc on en arrive au suicide, parce que, finalement, c'est la seule liberté qu'il leur reste. » (Marie Fleury)
… depuis des siècles, les Wayana vivaient heureux en harmonie avec la nature omniprésente (…). L'eau si claire était tirée du fleuve pour boire, se laver, etc. A la date d'aujourd'hui, l'eau des fleuves est devenue marron, chargée d'alluvions et d'autres saletés. Depuis l'orpaillage sauvage intensif, l'eau est devenue quasiment imbuvable sauf pour les candidats au suicide. Sur Camopi, où la situation est identique, plusieurs enfants sont morts de gastroentérite en 2004 après avoir bu par obligation l'eau du fleuve. Les poissons sont contaminés au méthyle (…). Les Amérindiens se voient dépérir, les bébés meurent prématurément ou sont malformés, les jeunes se suicident à grande échelle…
… l'illusion entretenue d'une modernité universelle, là où il n'y a qu'une culture dominante et expansionniste. Si l'une des causes profondes de leur malaise est une perte de l'estime de soi et de leur culture, tout projet impulsé et imposé de l'extérieur constitue une violence supplémentaire.
(Les abandonnés de la république. Gery, Mathieu, Gruner. Albin Michel 2014)


… l'image de Yahweh, « l'homme de guerre » du Cantique de Moïse d'Exode 15.3.
(La monolâtrie entre superstition et fanatisme. Pierre Bordreuil. Deus Unicus. Brepols 2014)


Le dieu se tait, le roi dit tout. Le monothéisme justifie la monocratie.
… le monothéisme biblique s'affirmera comme un monothéisme « politique », (…), tandis que le « monothéisme » amonien est de nature pan- ou plutôt cosmothéiste, c'est-à-dire qu'il confond l'unité de Dieu et de celle de l'univers…
(La religion d'Akhénaton : monothéisme ou autre chose? Christian Cannuyer. Deus Unicus. Brepols 2014)


… le monothéisme fut largement propagé dans toutes les couches de la société assyrienne (…), et cela comme le fondement de l'idéologie impériale…
(Ne fais pas confiance à un autre dieu. Jan Tavernier. Deus Unicus. Brepols 2014)


… Coureur Puissant a été parmi les premiers à tomber. Il avait un papier signé par un chef blanc. Ce papier disait que son peuple et lui étaient des amis des Napikwans, mais ils lui ont tiré quand même dessus.
Ils tuent nos femmes et nos enfants. Ils tuent nos anciens. (…) Ils nous tueront tous. Et moi qui n'ai plus de famille, j'accueille la mort avec joie.
(Comme des ombres sur la terre. James Welch. Albin Michel 2010)


Créée en 2008 pour enquêter sur les « pensionnats autochtones » qui ont existé pendant cent trente ans au Canada et dont le dernier a fermé en 1996, la Commission de vérité et réconciliation vient de rendre son rapport final (…).
Plus de trois mille enfants et adolescents indiens sont morts dans les pensionnats autochtones, et beaucoup ont été enterrés dans des tombes anonymes. Ceux qui avaient le pouvoir d'empêcher ces décès n'ont rien fait. (…) Le rapport décrit l'effet domino engendré par l'absence de lois encadrant ces écoles, majoritairement dirigées par des Eglises et financées par l’État canadien.
(Le Monde diplomatique. Janvier 2016)


Nous croyons en nous et dans les progrès de la science pour nous sauver de tous les maux, et dans le même temps nous souffrons d'une crise spirituelle majeure. Nous engendrons en ce moment même une épidémie colossale d'obésité et de terribles famines.
(Le coma des mortels. Maxime Chattam. Albin Michel 2016)


« On voudrait préserver la nature, mais a-t-on le choix ? » (Une habitante de Jokkmokk, en Suède)
« Quand il n'y aura plus d'élevage, les Saames seront perdus. Comme les Amérindiens sans leurs bisons. Mes enfants veulent vivre comme moi, mais je ne sais pas s'ils le pourront. » (Rickard Lanta)
(Eleveurs de rennes contre mineurs. Cédric Gouverneur. Le monde diplomatique décembre 2016)


tous nos espoirs et nos rêves ont été balayés,
et introduits dans ces machines
qui se nourrissent de nos yeux évidés.
(Between the end and where we lie. Thrice)


Si, comme le rappelle la Déclaration de 1789, la liberté est le principe et sa restriction l'exception, le meilleur moyen de protéger les libertés fondamentales consiste à ne pas légaliser l'exception.
(La loi des suspects. Raphaël Kempf. Le monde diplomatique juillet 2017)


… une contrainte (…) qui fut très développée contre les Youkaguirs et les Toungouses et qui consistait à capturer des otages afin de contraindre leur parenté à payer l'impôt, en fait une rançon.
(Vainqueurs ou vaincus ? Crubézy – Nikolaeva. Odile Jacob 2017)


Jules César, empereur et dieu, chroniqueur de lui-même, consacra tout son talent littéraire à rendre hommage à cette invasion qui tua un million de Gaulois et condamna les survivants à l'esclavage.
(Le chasseur d'histoires. Eduardo Galeano. Lux 2017)


Dieu a fait de nous les maîtres organisateurs pour établir un système (…). Il nous a insufflé l'esprit du progrès pour renverser les forces de la réaction sur toute la terre. Il a fait de nous les adeptes du gouvernement que nous devons administrer sur les peuples sauvages et séniles.
(Albert Beveridge, sénateur et conseiller de Roosevelt. 9 janvier 1900)


Hitler pourrait être considéré comme le plus grand coureur d’amok de l’histoire, comme un cas de « narcissisme absolu » : sa propre fin devait coïncider avec la fin du monde.


Voués que nous sommes à la reproduction du Même dans une identification sans fin, dans une culture universelle de l’identité, de là vient un immense ressentiment : la haine de soi. Non pas celle de l’autre, comme le veut un contresens bien établi fondé sur le stéréotype du racisme et de son interprétation superficielle, mais de la perte de l’autre et du ressentiment de cette perte. […] Culture ressentimentale certes, mais où, derrière le ressentiment envers l’autre, il faut deviner le ressentiment envers soi, envers la dictature de soi et du même, qui peut aller jusqu’à l’autodestruction.
La crise du capitalisme est une crise de la forme-sujet qui renvoie aux origines mêmes du capitalisme : à l’origine comme à la fin se trouvent le pillage et la violence directe.
… le djihadiste kamikaze et le school shooter de banlieue pavillonnaire présentent plus de traits communs que de différences.
(La société autophage. Anselm Jappe. La découverte 2017)


L'homme civilisé postmoderne a choisi son camp: il préfère être "résilient" que courageux, "flexible" que combatif, "réactif" que créateur... Il se méfie de son ombre portée et de toute singularité qui le rendrait (un peu plus) suspect au regard des surveillants généraux. Le suivisme et la ladrerie se voient ainsi distingués et préférés à l'honneur.
(Pour en finir avec la civilisation. François de Bernard. Yves Michel 2016)


... cette modernité dont nous feignons de ne pas savoir qu'elle est la haine de l'intériorité.
(La nuit du coeur. Christian Bobin. Gallimard 2018)


... le scientisme signe la faillite actuelle de la pensée occidentale.
(Pierre Legendre. Argumenta et Dogmatica. Mille et une nuits 2012)


Quand la foi chrétienne se répandit parmi les Yakoutes, on construisit à cet endroit l'église de la Trinité. Les cloches se mirent à carillonner. Alors l'esprit du chamane disparut à jamais.
(Gavriil Ksenofontov. Les chamanes de Sibérie et leur tradition orale. Albin Michel 1998)


Les estimations effectuées suggèrent ainsi une fourchette entre 6 et 10 millions d'habitants en Amazonie en 1492. A peine un siècle après, ils n'étaient déjà plus que quelques centaines de milliers.
(Amazonie. Stephen Rostain. Archéologia mars 2016)


... la religion a permis la transgression de toutes les règles traditionnelles et a recouvert les horreurs criminelles d'un parfum sacré.
(Dieux et hommes, modèles et héritages antiques, volume II. Jacques Bouineau. L'Harmattan 2018)


Terrible est ce lieu : c’est la maison de Dieu... » (…) le lieu où Dieu se tient avec sa cour comme l’empereur, le roi…
"... nous avons besoin de choses visibles pour nous élever à Dieu et c'est bien à quoi les images ne contribuent pas peu."
Là où la transcendance religieuse s'est effacée, elle a laissé la place à des formes de vénération dont les effets pervers se sont révélés pour ce qu'ils étaient.
(Le symbolique, le Sacré et l’Homme. Henri de Lumley. CNRS Editions 2019)


La sursocialisation électronique – l’incarcération dans le monde machine – était le projet des technocrates pour optimiser la gestion du cheptel humain en se débarrassant du facteur humain. Ils y sont parvenus. Cette interconnexion réalise, d’une autre façon, le projet des promoteurs de la               « technologie cyborg », grâce à laquelle il devient « de plus en plus difficile de dire où s’arrête le monde et où commence la personne ».
(Pièces et main d’œuvre. La décroissance juillet 2020)


Les balles étaient des prémonitions, des fantômes peuplant les rêves d’un avenir dur, fulgurant. Les balles continuèrent leur course après nous avoir transpercés, devinrent la promesse de ce qui nous attendait, la vitesse et la tuerie, la ligne dure, fulgurante, des frontières et des édifices. Ils ont tout pris et l’ont réduit en une poussière aussi fine que de la poudre à canon, ils ont tiré des coups de feu en l’air pour célébrer leur victoire, et les balles perdues se sont envolées dans un néant d’histoires écrites à l’encontre de la vérité, vouées à l’oubli. Ces balles perdues et leurs conséquences retombent sur nos corps qui ne se méfient pas, encore aujourd'hui.
(Ici n’est plus ici. Tommy Orange. Albin Michel 2019)


La civilisation de l’île de Pâques n’a pas disparu à cause d’une mauvaise gestion de l’environnement. Ce sont les Occidentaux en quête de profit qui ont détruit une terre qui ne possédait rien d’autre que l’originalité de sa culture.
(Frédéric Lontcho. L’archéologue septembre 2020)


… un sentiment vague, diaphane et impalpable de n’avoir aucun échappatoire à ce monde aliéné dont on constate les méfaits en permanence. (…) J’ai l’impression vague de vivre sous cloche et ne m’en satisfait pas. Tout, de l’urbanisme à l’administration, me semble dévolu au fait de rendre chaque aspect de nos vies interchangeable, transitoire et impersonnel.
(Marc Antoine Dolet. La décroissance octobre 2020)


… l’imagerie de masse a anéanti l’autarcie psychologique des anciens. (…) les nouveaux médias ont progressivement installé les Occidentaux dans une attitude de spectateur. (…) On assiste ainsi à une nationalisation des sujets de conversation. L’actualité, les feuilletons, les faits divers, les catalogues et les manuels scolaires « synchronisent » les représentations et donnent forme à une conscience et une mémoire collectives. (…) Les tableaux sociaux ne mettent pas en scène la vulgarité des nouveaux riches, mais donnent à admirer une classe supérieure qui a tout de l’aristocratie : toilette, manière et distinction.
(Du magasin au magazine. Anthony Galluzzo. Le Monde diplomatique octobre 2020)


Composé d’environ 2000 âmes, le peuple arikara n’est plus alors que l’ombre de ce qu’il fut : décimé par une succession d’épidémies de variole (l’épidémie de variole de 1780-1781 fit passer la population des Arikaras, Gros Ventres et Mandanes de 19000 individus à moins de 6000 (…), soit une chute démographique de 68%) (…). Des « 32 gros villages » existant vers le milieu du XVIIIème siècle, il n’en subsiste que deux (…) formés des fragments de communautés de jadis…
Le chef Les Quatre Ours (…) prononce le 30 juillet un discours pathétique sur son lit de mort, appelant à l’extermination des « Blancs » qu’il avait accueillis et protégés comme des « frères » mais qui, tels des « chiens au coeur noir », l’ont « trompé ». Le valeureux chef meurt, regretté de tous.
Au début du printemps 1838, plus de 90 % des Mandanes sont morts : la population de Mih-Tutta-Hang-Kush, qui comptait 1600 individus un an plus tôt, n’en compte plus qu’une trentaine. Quatre-vingt guerriers se sont suicidés. Quant aux Gros Ventres, ils ont perdu la moitié de leur population. Le pays indien fréquenté par Charbonneau s’est transformé (…) en « grand cimetière ». Plusieurs charniers à ciel ouvert sont recouverts plus tard d’un monticule de terre. Sous les yeux de Charbonneau, une civilisation flamboyante s’évanouit, comme Radisson l’avait vu des Hurons deux siècles plus tôt.
« Il faut le voir pour le croire », écrit Trobriand à propos de « la masse d’iniquités dont les pauvres Peaux-Rouges ont été victimes [récemment] de la part des Blancs ». Les « agents du bureau indien », selon lui, forment « une association de voleurs qui font leur fortune aux dépens des Peaux-Rouges ». « Faut pas s’étonner si j’aime mieux les sauvages », renchérit Beauchamp.
(L’Amérique fantôme. Gilles Havard. Flammarion 2019)


… durant la guerre du Vietnam, les Etats-Unis larguèrent trois fois plus de bombes qu’ils n’en avaient employées contre l’Allemagne au cours de la Seconde Guerre mondiale.
(Humanité. Rutger Bregman. Seuil 2020)


… la complexité des processus sociopolitiques qui se nouent dans le Caucase de la fin de l’époque tsariste. Elle rappelle un temps où, loin de correspondre au modèle de l’Etat-nation, ces territoires étaient parsemés d’une mosaïque de peuples ; ils allaient restés jusqu’au XXème siècle un formidable conservatoire de minorités.
(Etienne Peyrat. Le Monde diplomatique janvier 2021)


Lorsque progressivement toutes les formes de socialisation anciennes auraient disparu – c’est pratiquement le cas aujourd'hui -, les individus esseulés remettraient leur sécurité dans les mains de l’État tout-puissant.
(Denis Bayon. La décroissance mars 2021)


« Environnement, c’est la parole d’autres gens, c’est une parole de Blancs (…) Ce que vous nommez environnement, c’est ce qui reste de ce que vous avez détruit. » (David Kopenawa. Rio de Janeiro 1992)
(Les gens de l’or. Michèle Baj Strobel. Terre humaine 2020)


« Il n’y a plus ni Juif ni Grec, il n’y a plus ni esclave ni libre, il n’y a plus ni homme ni femme ; car vous êtes tous un en Jésus-Christ. » 
(Epître aux Galates)


Les Blancs labourent le sol, arrachent les arbres, tuent tout. (...) Partout où l'homme blanc a touché, c'est douloureux.
(Wintu woman)


Quand je me suis battu pour protéger ma terre et ma maison, on m'a traité de sauvage. Quand je n'ai ni compris ni accueilli ce mode de vie, on m'a traité de paresseux.
(Chief Dan Gerge)


… les Etats-Unis totalisent à eux seuls 39 % de l’ensemble des budgets militaires de la planète…
(Martine Bulard. Le monde diplomatique juin 2021)


La lecture des journaux de ces officiers ne permet pas de connaître la société tahitienne, mais elle révèle combien leur propre société les étouffait.
(L’aventurière de l’Etoile. Christel Mouchard. Tallandier 2020)


La terreur qui s’est emparée de tous depuis un an révèle des êtres dépossédés de leur capacité à comprendre le gigantisme qui régit leurs vies, incapables de s’organiser ensemble pour faire face aux aléas de l’existence et donc asservis aux injonctions de l’État. (…) La réflexion s’est ainsi rétrécie au point que le discernement est exclu des gestes de la vie quotidienne. Ceux-ci n’ont plus aucun sens, mais seule l’obéissance aux décrets publiés par l’exécutif s’inscrit dans le champ possible des agissements de tous. Nous avons troqué, contraints et contrits, les dernières bribes de notre humanité et de notre liberté contre des masques et des vaccins expérimentaux, des passeports sanitaires, des téléphones connectés.
(Hervé Krief. La décroissance juillet 2021)


Un peuple antique, le premier et le légitime maître du continent américain, fond chaque jour comme la neige aux rayons du soleil, et disparaît à vue d’oeil de la surface de la terre. (…) les forêts tombent, les marais se dessèchent (…) l’Américain ne voit dans tout cela rien qui l’étonne. Cette incroyable destruction (…) lui paraissent la marche habituelle des évènements de ce monde.
Ces Indiens ne portaient pas d’armes, ils étaient couverts de vêtements européens ; mais ils ne s’en servaient pas de la même manière que nous. On voyait qu’ils n’étaient pas familiarisés à leur usage, et qu’ils se trouvaient comme emprisonnés dans leurs replis. (…) Ces êtres faibles et dépravés appartenaient cependant à l’une des tribus les plus renommées de l’ancien monde américain. Nous avions devant nous, et c’est pitié de le dire, les derniers restes de cette célèbre confédération des Iroquois dont la mâle sagesse n’était pas moins connu que le courage, et qui tinrent longtemps la balance entre les deux plus grandes nations de l’Europe.
Dans peu d’années, ces forêts impénétrables seront tombées, le bruit de la civilisation et de l’industrie rompra le silence de la Saginaw. Son écho se taira. Des quais emprisonneront ses rives ; ses eaux qui coulent aujourd'hui ignorées et tranquilles au milieu d’un désert sans nom seront refoulées dans leur cours par la proue des vaisseaux.
(Quinze jours au désert. Alexis de Tocqueville. Le passager clandestin 2011)


Scientisme et psychiatrie pharmaceutique, abandon et chosification du patient, délire gestionnaire, misère matérielle, fin de la réflexion sur la folie… tout cela conduit à une perte de sens. (…) Les processus de banalisation du mal qui conduisent à la barbarie et aux horreurs (…) se déroulent sous nos yeux. Cette crise est celle de notre monde. (…) La négation de l’humain est à l’oeuvre, et ouvre un gouffre devant nous. (…) l’homme est de plus en plus absent de l’homme.
(Patrick Coupechoux. Le Monde diplomatique mars 2020)


Accélérant la manipulation cinématographique et télévisuelle (…), la production industrielles d’images portatives sur les smartphones mondialisés a permis « d’externaliser » la vérité dans le cloud. L’être humain réel n’est plus que secondaire par rapport à son double numérique. (…) D’où s’étalant sous nos yeux, la destruction de la sensibilité, de l’intelligence, donc du réel.
(Denis Baba. La décroissance mars 2020)


On éprouve un sentiment de tristesse profonde en contemplant ces débris d’une nation puissante qui succombe aujourd'hui, comme autrefois les Natchez, et tant d’autres, sous la main de notre civilisation envahissante et impitoyable.
Le dollar est le Dieu et le tyran de la libre Amérique, et tous les moyens sont bons pour en amasser (…). On a dit assez justement: « l’Amérique est une barbarie éclairée au gaz ».
(Loti en Amérique. Bleu autour. Mai 2018)


Et si tu l’attaques pas [le système] arase les montagnes pour exploiter le minerai, il barre tous les cours d’eau, il bétonne le désert et il te fout en taule de toute manière.
(Le gang de la clé à molette. Edward Abbey)


"Tant que les bisons et par conséquent les Indiens, encombreront le passage des lignes, nous aurons des collisions et des troubles." (Général William Sherman) Ainsi, le haut Commandement de l'armée encourage-t-il l'extermination de bisons, en mettant son soutien logistique à la disposition d'expéditions de tueurs professionnels dans les Plaines. De riches entrepreneurs sont invités par ailleurs à d'énormes chasses au bison, comme celle organisée à Fort Mac Pherson en 1871 (...): pas moins de 600 bêtes, dont les carcasses sont abandonnées sur place, sont abattues à l'occasion d'un véritable assaut militaire, appuyé par la cavalerie.
On extermine les animaux avec des armes de guerre et lorsque les migrations de troupeaux de bisons passent à portée des forts, l'artillerie les pilonne au canon (...). Les tueries de bisons sont colossales. Pour les seules trois années de 1872 à 1874, plus de 3 millions de bêtes sont abattues. On fait des montagnes de leurs os. L'odeur de putréfaction produite par la décomposition d'innombrables carcasses est insupportable. (...) Le général Sheridan le répète en 1869 (...): "Le moyen le plus rapide d'obliger les Indiens à mener une vie civilisée consiste à envoyer dix régiments de soldats dans les Plaines, avec ordre de tuer les bisons jusqu'à ce qu'ils deviennent trop rares pour subvenir aux besoins des Peaux-Rouges."
Face à la menace indienne, l'armée n'est pas en effet dans une situation de guerre conventionnelle (...). Elle est engagée dans une contre-guérilla, où l'ennemi n'a ni camp de base, ni lignes de défense, ni stocks importants de munitions ou de vivres. Il faut donc le frapper "en lui rendant l'existence impossible dans la région où il opère."
... priver définitivement les Indiens de leurs ressources pour les faire disparaître. Les Sioux tirent en effet du bison non seulement la viande qui les nourrit, mais aussi les peaux de leurs tentes et de leurs vêtements, la matière osseuse de leurs outils et de leurs instruments, les cordes de leurs arcs et jusqu'à la colle employée pour l'assemblage des boucliers, qui est tirée des sabots. (..) Il y a maintenant les "progressistes", qui sont prêts à accepter les exigences des autorités américaines, et les "anti-progressistes", qui refusent la politique d'extinction culturelle dont ils sont l'objet. (...) Pour les américains, les "progressistes" sont les "gentils" Indiens (friendly Indians), les autres étant les "hostiles".
En isolant et en rassemblant les Indiens, la création des réserves contribuera à les transformer d'autre part en individus pacifiques et soumis à l'autorité. (...) Dans l'esprit des responsables américains, les réserves indiennes s'apparentent ainsi à des camps de rétention de groupes d'individus étrangers potentiellement dangereux, comme à des centres de rééducation par le travail. (La réserve de Pine Ridge est identifiée sous le nom de camp de prisonniers n°334)
En 1883, le Gouvernement fédéral a ordonné l'arrêt des danses collectives qui relèvent désormais des "délits indiens". La Danse du Soleil est bientôt interdite (...). En 1887, sont désormais proscrites les pratiques traditionnelles de deuil et les cérémonies de guérison conduites par des Medicine Men.
"Il vaut mieux tuer de temps en temps un Indien innocent plutôt que de miser sur leur bonté; et, pour les exterminer, il est nécessaire de recourir aux meilleures armes sans regarder au prix."
"Un Indien a été rôti dans la tente de Big Foot aussi complètement que s'il avait été cuit dans un four en briques."
"Obus après obus, il a mitraillé les Indiens en fuite - qui se sont abattus comme le blé devant le moissonneur, non pas un par un, deux ou trois, mais par douzaines."
"Ils ont tiré rapidement et il m'a semblé qu'il ne s'est écoulé que quelques secondes avant qu'il n'y ait plus une seule chose vivante devant nous; les guerriers, les squaws, les enfants, les poneys et les chiens - car ils étaient tous mélangés ensemble - sont tombés (...) et je ne pense pas que quoi que ce soit de cette masse ne soit arrivé jusqu'à une distance de moins de cent yards."
"Nous les avons trouvés là en grosses masses, entassés les uns sur les autres - les femmes, avec les enfants dans les bras, jeunes et vieilles, les chevaux et les mules dans des positions diverses, les chariots brisés, les vêtements en pièces. (...) Il y avait là toute une famille, sauf le père, sous la caisse d'un chariot retourné, avec les chevaux encore dans les brancards, leurs jambes écrasées, se tordant d'agonie. Ici un papoose pleure sur le sein de sa mère qui, froide et insensible, ne peut plus le nourrir; là, est couchée une jeune fille avec sa longue chevelure poissée de sang, cachant son visage mutilé. Ils sont tous étendus dans la beauté incommunicable de la mort."
"... aucun des hommes qui ont fait feu [sur les Lakota assis au conseil] ne peut dire qu'il ne sait pas sur qui il a tiré, puisque la gueule du canon de leurs fusils se trouvait éloignée d'à peine un pied de ceux qu'ils tenaient en joue."
"... le grand nombre d'animaux morts suggère que les tirs de Hotchkiss et de fusils ont été intensifs et qu'ils n'ont pas été concentrés sur des cibles particulières."
Trois semaines après les évènements, on découvre encore des cadavres. Le 21 janvier 1891, le policier indien Red Hawk, qui cherchait depuis des semaines sa soeur Walks Carrying the Red disparue à Wounded Knee, trouve les restes de son corps et ceux de ses trois enfants (..) deux petites filles de cinq à sept ans et un garçon de huit à dix ans (...). L'examen des corps montre que "les tirs ont été effectués de si près que les vêtements de chacune des victimes portent des brûlures de poudre". Selon les observations recueillies, l'identité des meurtriers ne fait guère de doute: ce sont les hommes de l'unité du 7ème de cavalerie (...). Les tueurs ont laissé en effet des preuves accablantes de leur identité. Autour des corps, on voit de nombreuses traces de chevaux ferrés, qui portent l'empreinte de fers produits par la manufacture Goodenough, fournisseur officiel de l'armée américaine depuis 1873. Les tireurs n'ont même pas pris la précaution d'effacer les traces de leur crime; éjectée d'un de leurs fusils, une cartouche de l'US Army est même tombée au milieu des corps. (...) L'examen des corps (...) révèle que les deux petites filles ont été tuées de face, d'une balle tirée à bout portant dans la poitrine, tandis que le garçon a été exécuté d'une balle dans la tête. Il était sans doute assis, le tireur placé derrière lui: la balle est entrée dans la partie supérieure du crâne, sur le côté droit, pour ressortir sous l'oeil du même côté, ouvrant dans la joue un trou gros comme une pièce d'un dollar. Le trou d'entrée de la balle sur le crâne présente des traces de poudre, indiquant une fois encore un tir à bout touchant. Quant à la mère, elle a été tuée alors qu'elle était assise à côté de son fils par un tireur qui se trouvait immédiatement derrière elle: la balle est entrée par l'épaule droite et est ressortie vers le bas de l'abdomen. Elle a dû agoniser pendant un temps indéterminé avant de mourir de sa blessure.
Dans les mois qui suivront, on continuera encore à trouver, au hasard, des corps anonymes, réduits à l'état de squelettes blanchis étendus dans l'herbe aux environs de Wounded Knee. Mais ils ne menaceront plus personne.
"Nous faisons la prédiction que l'élimination de Big Foot et de ses guerriers aura un effet d'avertissement..." (Chadron democrat 1er janvier 1891)
... lorsqu'on leur a dit qu'ils pouvaient tranquillement sortir de leur cachette et qu'aucun mal ne leur serait fait, les "petits garçons sont sortis des endroits où ils avaient trouvés refuge et aussitôt qu'ils les ont vus, les soldats les ont encerclés et les ont exterminés." (Turning Hawk et American Horse)
Dans les années 1960 et 1970, le Service de Santé indienne a pratiqué des stérilisations de femmes indiennes, le plus souvent sans leur consentement ou sans les avoir informées de la réalité de ces opérations. Près de 70000 femmes auraient ainsi pu avoir été stérilisées sur un total de 100000 à 150000 femmes indiennes en état de procréer.
Caractéristique de la guerre dirigée contre les populations civiles, le massacre en vue d'obtenir la soumission vise à précipiter la capitulation de l'ennemi, de manière à accélérer la sujétion de ses populations. Ce type de massacre militaire présente trois grandes caractéristiques, que l'on observe également à Wounded Knee:
1. La réalisation du massacre vise à produire un effet de terreur sur les populations civiles: c'est la raison pour laquelle la tuerie de masse n'est pas occultée, mais rendue visible au contraire: on abandonne un éparpillement de corps humains et animaux sur place, de la même manière qu'on laisse la presse en rendre largement compte.
2. Au-delà de la soumission ponctuelle de la collectivité à qui on fait subir un massacre, l'objectif principal est l'instauration d'un nouveau système social, politique et culturel (...) décimés, dépossédés et démoralisés, les survivants lakota de Wounded Knee ont tout perdu, leurs biens comme leurs liens tribaux et familiaux: ils dépendent désormais entièrement de ce que les autorités américaines voudront bien faire d'eux.
3. (...) les Indiens ne sont pas considérés comme capables de produire de la valeur économique: les massacrer est donc sans grandes conséquences, puisqu'il ne s'agit que de populations non seulement économiquement inutiles mais à la charge des autorités fédérales...
"[La] relation [des nations indiennes] avec les Etats-Unis ressemble à celle d'un pupille vis-à-vis de son tuteur. (...) elles font appel à lui afin qu'il exauce leurs demandes et s'adressent au Président comme à leur grand-père." (...) les réserves vont devenir un véritable laboratoire de la transformation du statut des Indiens. Il s'agit d'une part de les fixer à l'intérieur d'espaces clos (...) on cherche en outre à les contraindre à passer d'un stade nomade et prédateur à un état sédentaire...
La guerre totale imposée aux Indiens s'inscrit dans la démarche génocidaire qui préside à la politique indienne des autorités américaines. Il s'agit de libérer les territoires convoités en imposant la terreur jusqu'à ce que "tous les Indiens aient été tués ou emmenés dans un pays où ils peuvent être surveillés", dit Sherman. Aussi, il ne faudra pas hésiter à provoquer "l'extermination des hommes, des femmes et des enfants" et, durant l'assaut, les soldats ne devront "pas s'arrêter à distinguer entre les hommes et les femmes ni à établir la discrimination entre les âges". (...) il s'agit de mener des guerres irrégulières, visant directement les populations civiles, avec les moyens techniques de la guerre conventionnelle. Le but poursuivi est l'anéantissement...
... le leader de la tribu des Nez-Percés (...) le dit à sa façon: "J'ai voulu que les grands chefs blancs m'expliquent d'où ils tiraient l'autorité qui leur permet d'ordonner à l'Indien de demeurer à tel endroit alors que celui-ci voit les Blancs aller où bon leur semble. Ils ne peuvent pas me répondre."
Cette stratégie de la terreur, qui faisait porter sur les Lakotas la responsabilité des hostilités tout en leur retirant le droit de se défendre, a réussi au-delà de toutes les espérances. (...) la logique génocidaire est incompréhensible, puisque contradictoire: elle s'affiche au nom de l'ordre et de la justice, mais elle apporte le chaos et le malheur. Elle dit vouloir le bien des Indiens, mais elle en fait des sous-hommes. Et ses émissaires se présentent comme leurs amis alors qu'ils représentent une puissance qui ne veut pas les laisser vivre.
En 1883, le Gouvernement fédéral a ordonné l'arrêt des danses collectives qui relèvent désormais des "délits indiens". La Danse du Soleil est bientôt interdite (...). En 1887, sont désormais proscrites les pratiques traditionnelles de deuil et les cérémonies de guérison conduites par des Medicine Men.
Ces vastes paysages de prairies et de faibles collines parsemées de pins, ces étendues ondulantes parcourues de ruisseaux aux méandres bordés de buissons et de peupliers, sont désormais fractionnés et compartimentés par d'interminables clôtures de fils de fer barbelé. A la jouissance collective de la terre et de ses ressources a été substituée l'implacable propriété privée. Une grille invisible, étendant sans cesse ses ramifications, s'est imposée au paysage, traçant partout un réseau orthogonal de routes et de parcelles, de croisements à angle droit au milieu de nulle part...
Un ancien combattant lakota oglagla de Pine Ridge dira: "Ils nous ont fait beaucoup de promesses, beaucoup plus que je ne peux m'en rappeler; mais il y en a une qu'ils ont tenue: ils avaient promis de prendre nos terres et ils l'ont fait."
"... c'est au nom de la civilisation que ces marchands de pétrole et de porc salé, qui ne marchent qu'avec une Bible dans leur poche, se [sont livrés] au massacre d'une population à peu près sans défense! Civilisation hypocrite et brutale, sans esprit de justice et dans laquelle la passion du lucre étouffe les sentiments..." (La civilisation yankee. L'intransigeant 2 janvier 1891)
"Les officiers commandant ces unités sont des gentlemen, humains et sensibles dans toutes leurs attitudes, exceptionnellement raffinés et éduqués, les plus éloignés qui soient de toute cruauté ou inhumanité." (Révérend Lowell)
Depuis 1880 les Lakotas ne sont pas seulement enfermés dans leurs réserves; ils sont surveillés de près par les agents des réserves, les responsables de l'éducation indienne et les missionnaires qui scrutent leurs progrès sur la voie de la civilisation: sont-ils mariés? Vont-ils à l'église et sont-ils baptisés? De quoi vivent-ils, comment se nourrissent-ils et quel travail sont-ils capables d'accomplir? Parlent-ils bien anglais et quel genre d'éducation possèdent-ils? Tous les actes considérés comme déviants, ou rétrogrades, qu'ils pourraient commettre, sont immédiatement signalés à la commission des Affaires indiennes, ou au Département de l'Intérieur, afin qu'ils soient réprimés sans délai.
"Les Indiens n'ont jamais occupé cette terre. Un peuple n'occupe pas un pays, au simple prétexte qu'il y erre. (...) Les Indiens n'ont pas plus occupé ce pays que les bisons et les bêtes qu'ils y chassaient. Trois cent mille personnes n'ont aucun droit à détenir ce continent et à en maintenir privée une race capable d'y implanter une population nombreuse et de lui assurer les bienfaits de la civilisation." (Pasteur Lyman Abbott)
Ainsi, l'organisation collaborative qui sous-tend l'entreprise d'extermination étend-elle ses ramifications jusque dans les strates les plus profondes de la collectivité visée. Comme l'écrit le spécialiste de l'étude des pratiques génocidaires Richard Retchman, ce fonctionnement particulier révèle "cette capacité effroyable d'infiltrer tous les niveaux de la société pour amener chacun à agir selon sa seule direction, y compris ceux qui lui sont naturellement les plus hostiles, sans même avoir besoin de les convertir à sa raison ou à son idéologie."
Non seulement aucune réparation n'a jamais été accordée aux Lakotas pour le préjudice qu'ils ont subi, mais les biens dont ils ont été dépossédés alimentent un marché particulièrement lucratif, dont ils sont exclus.
On y vend aux touristes des cartes postales colorisées reproduisant les clichés des cadavres de 1890.
L'Amérique de Nixon est alors empêtrée dans la guerre du Vietnam. L'opinion américaine découvre la réalité des massacres commis par ses propres soldats, comme à My Lai, en mars 1968, qui ressemble à une étrange réplique de Wounded Knee. Comme en 1890, les soldats américains ont exterminé des centaines de femmes et d'enfants autochtones sans défense, abattant systématiquement leurs animaux. Et comme à Wounded Knee, des scènes injustifiables se sont reproduites: "Beaucoup de femmes se sont jetées sur les enfants pour les protéger", a témoigné un des soldats, et quand les gamins "qui étaient assez grands pour marcher" se sont relevés, ils ont été abattus à l'arme automatique.
(Ce qui est arrivé à Wounded Knee. Laurent Olivier. Flammarion 2021)


... le livre de Josué qui nous raconte la conquête de la Terre promise par les Hébreux (...). Une invasion très violente qui se solde par de nombreux massacres de populations (...). Tout être vivant est soigneusement exterminé par ordre du vainqueur impassible.
(...) Après leur victoire, les Hébreux font massacrer les captifs de sexe masculin. Tous sont méthodiquement passés au fil de l'épée. Mais les vainqueurs décident d'épargner les femmes, devenues leurs prisonnières. (...) "toutes les fillettes qui n'ont pas connu l'étreinte conjugale, gardez-les en vie pour vous." (Moïse)
"Tu mettras à mort hommes et femmes, enfants et nourrissons, bœufs et moutons, chameaux et ânes." (Samuel). Saül ne devait épargner ni les ennemis vaincus, ni leurs troupeaux.
(Débauches antiques. Christian Georges Schwentzel. Vendémiaire 2023)


Les Espagnols descendant pour la première fois le fleuve en 1541 furent les derniers témoins de la grandeur d'avant. Ils rencontrèrent des milliers d'Amérindiens et longèrent d'immenses agglomérations pourvues de puissants systèmes défensifs, des greniers débordant de maïs, des enclos remplis de tortues, un urbanisme organisé avec des rues et des places, parfois même des temples. Quelques décennies plus tard, tout avait disparu.
(Marcher en Amazonie. Rostain - de Saulieu. Dossiers d'archéologie janvier 2023)


Darius Ier (...), qui a régné de 522 à 486 avant notre ère sur un empire de dimensions alors sans précédent, proclamait que ses ennemis étaient mus par le mensonge: seule sa propre politique était donc favorable à Dieu ou conforme à l'ordre...
... la "religiosité" des rois était sans doute une dimension essentielle pour renforcer la reconnaissance de leur légitimité en tant que souverains. La "religion" est une sorte de capital symbolique (ou de pouvoir symbolique) dont on peut tirer parti dans différentes intentions.
(Zarathoustra et sa religion. Michael Stausberg. Les belles lettres 2022)


« Tel quel tu désires ce qui te dépasse. Finalement, si tu domptes l'humanité entière, tu iras te battre contre les forêts, les neiges, les fleuves, les bêtes sauvages. Ignores-tu donc que les grands arbres, si longs à croître, sont arrachés en une heure seulement? (…) Mais toi qui te vantes d'aller à la poursuite des bandits, pour tous les peuples où tu es parvenu, c'est toi le bandit. (...) plus tu as, plus s'exaspère en toi le désir de ce que tu n'as pas. (...) si tu es un dieu, tu dois accorder aux mortels tes bienfaits au lieu de leur arracher leurs biens; mais si tu es un homme, pense toujours à ton humaine condition: c'est une sottise de ne songer qu'à ce qui te fait oublier qui tu es. » Ainsi parla le Barbare [à Alexandre]. (Quinte Curce)
Les barbares sans lois, répandus sur les bords de la mer Caspienne, ont-ils jamais commis un pareil attentat? Non. Busiris lui-même n'était pas assez féroce pour arroser ses autels du sang d'un enfant, et jamais Diomède n'a donné une semblable pâture à ses chevaux. (Sénèque au sujet des actes commis par les Grecs)
... nourris par la foi en la promesse et par la parole, nous vivrons en maîtres dominant la terre. (...) Nous devons en effet réaliser que commander, c'est avoir le pouvoir d'imposer en maître l'ordre donné.
"Je serai leur Dieu et ils seront mon peuple" (...) je serai tout ce que les hommes peuvent honnêtement désirer (...) en un mot tous les biens, afin que, comme dit l'apôtre: "Dieu soit tout en tous." Celui-là sera la fin de nos désirs, qu'on verra sans fin, qu'on aimera sans dégoût, qu'on louera sans lassitude: occupation qui sera commune à tous, ainsi que la vie éternelle. (Augustin)
Voilà ce qui sera à la fin sans fin. Et quelle autre fin nous proposons-nous que d'arriver au royaume qui n'a point de fin? (Augustin)
(Utopia. Jean-Louis Poirier. Les belles lettres septembre 2022)


... le pharaon Akhenaton qui régna de -1355 à -1338 et qui tenta d'édifier un empire sur la base de l'unification de dieu comme le feront les autres empires après lui: le dieu unique est l'expression céleste du pouvoir du souverain unique.
"Vous abolirez tous les lieux où les peuples que vous dépossédez auront servi leurs dieux, sur les hautes montagnes,, sur les collines, sous tout arbre verdoyant.
Vous démolirez leurs autels, briserez leurs stèles; leurs pieux sacrés, vous les brûlerez, et vous abolirez leur nom en ce lieu." (La Bible. Ancien Testament Deutéronome)
"Toutes les mythologies coloniales se nourrissent de l'héroïcisation du conquérant et de la dépréciation essentialiste des autochtones." (O. Gazalé. Le mythe de la virilité, un piège pour les deux sexes)
"Le discours des dirigeants du monde paneuropéen - en premier lieu, mais pas seulement, des Etats-Unis et de la Grande Bretagne - et celui des grands médias et des intellectuels de l'establishment, font constamment appel à l'universalisme en tant que clé de voûte de leur politique. (...) Leur ton est souvent moralisateur, dénonciateur, et arrogant, même si les politiques préconisées sont toujours présentées comme reflétant des valeurs et des vérités universelles." (I. Wellerstein. L'universalisme européen, de la décolonisation au droit d'ingérence)
... une guerre permanente "est engagée par chaque groupe dirigeant contre ses propres sujets et l'objet de la guerre n'est pas de faire ou d'empêcher des conquêtes de territoires, mais de maintenir intacte la structure de la société." (G. Orwell, 1984)
(Une mythologie berbère. Hassane Benamara. L'Harmattan 2022)


"... arrivèrent l'admirable Kynégios avec le consulaire et le duc et des forces importantes, militaires et civiles. Beaucoup d'idolâtres, avertis de son arrivée, étaient sortis de la ville et s'étaient rendus les uns dans des villages, les autres dans d'autres villes. [...] Le susdit Kynégios réquisitionna les maisons des fugitifs. Le lendemain, ayant convoqué les habitants de la ville, en présence du duc et du consulaire, il leur notifia la lettre impériale qui ordonnait que les temples des idoles fussent détruits et livrés au feu. Ce qu'ayant entendu, les idolâtres se lamentèrent à grands cris, de sorte que les représentants de l'autorité, indignés, les menacèrent et leur envoyèrent des soldats pour les frapper à coups de verges et de bâtons. Quant aux chrétiens, avec une immense allégresse, ils acclamaient les empereurs et les autorités. Puis, accompagnés des autorités et des troupes, ils coururent détruire les temples des idoles. [...] les démons, abusant de la bonne volonté des Gazéens, si faciles à conduire, avaient rempli de leur erreur toute leur ville et les environs. [...] lorsqu'on les ramène à notre sainte foi, ils deviennent des chrétiens zélés." (Marc le Diacre, évêque de Gaza au début du VI° siècle)
(Le Proche-Orient. Catherine Saliou. Belin 2020)


C'est pourtant à partir de 1861 que les lois ancestrales représentées par l'autorité patriarcale et le gouvernement local imposé par la tradition commencent à être minés, par l'Eglise d'abord, puis par l'Etat. (...) Au régime patriarcal succède le régime théocratique, représenté surtout par le prêtre.
(Les barrières de la solitude. Luis Gonzalez. Plon 1982)


Le roi d'Abomey (...) est "hors du commun", à la fois homme et dieu, doué de pouvoirs magiques et spirituels autant que temporels.
(Vaudou. Philippe Charlier. Plon 2022)


"Même après la disparition de la pandémie, un contrôle et une surveillance plus autoritaire des citoyens et de leurs activités sont maintenus, voire intensifiés. Afin de se prémunir contre la propagation de problèmes de plus en plus globaux - des pandémies et du terrorisme transnational, aux crises environnementales et à l'augmentation de la pauvreté -, les dirigeants du monde entier ont acquis une emprise plus ferme sur le pouvoir." (Scénarios pour l'avenir de la technologie et du développement international. Fondation Rockefeller)
Plus qu'un droit, la santé est désormais un devoir individuel et un objectif collectif. (...) La santé n'est plus une affaire de responsabilité individuelle, ou de solidarité; mais un motif de déresponsabilisation, de culpabilisation, d'isolement, d'exclusion, de contrôle total de l'individu et de la société.
(Marielsa Salsilli. Nexus septembre 2022)


Désigner le monstre permet aux gens de se fédérer face à l'ennemi en retrouvant un territoire commun. Mais rester dans ce constat et cette dimension, c'est basculer dans un univers paranoïaque entouré d'ennemis face auxquels la seule solution serait de se retrouver dans un petit phalanstère sectaire. (...) Nous sommes clairement en plein effondrement (...) il est impossible de fuir. Dans tous les autres pays du monde, ce sera pareil, voire pire. (...) Mais que puis-je faire, moi, pauvre petite fourmi, face à la grande machine à broyer totalitaire?
(Louis Fouché. Nexus mars 2023)


"La chute du monde vivant en dehors de l'attention collective et politique, en dehors du champ de l'important, c'est là l'évènement inaugural de la crise de la sensibilité. Par "crise de la sensibilité", j'entends un appauvrissement de tout ce que nous pouvons sentir, percevoir, comprendre et tisser comme relations à l'égard du vivant. Une réduction de la gamme d'affects, de percepts, de concepts et de pratiques nous reliant à lui." (Baptiste Morizot)
(...) le youyou libyen était bien antérieur à la conquête arabe, de même que le iou iou grec était préhellénique (donc non indo-européen). (...) En Grèce l'influence de cette tradition archaïque aurait régressé au cours du temps: "trop primitive et comme anarchique, elle s'insère mal dans le mécanisme des rites classiques... " (Louis Gernet) (...) Le cri serait ainsi relégué du côté de l'archaïque, du non élaboré que la société devait canaliser et réglementer.
(Au plaisir des dieux. Adeline Grand Clément. Anacharsis 2023)


... une déformation propre à la pensée moderne: sa difficulté chronique à concevoir une motivation technique indépendante d'une perspective d'accroissement de puissance.
... la domestication a engendré un univers divin particulièrement proche de l'homme, et avec lequel l'individu fusionne désormais après sa mort. (...) Cette nouvelle approche connaît un corollaire, celui d'une influence universelle de l'homme sur la nature, de par son pouvoir vitalisant. (...) En stimulant un recentrage du cosmos autour de l'homme, cette métamorphose pourrait bien être le préliminaire à l'appropriation du monde, sa dégradation à l'état de ressource, qui habite jusque de nos jours les héritiers de cette révolution néolithique.
(Les graines de l'au-delà. Nissim Amzallag. Editions de la Maison des sciences de l'homme 2023)


Dépossédés de leurs terres par les colons, certains Quichuas tentent ainsi de trouver un refuge forestier, chez les Achuar, le plus loin possible des Blancs.
(La nature domestique. Philippe Descola. Editions de la Maison des sciences de l'homme 2019)


Les peuples qui se sont vus contraints d'adopter un mode de vie occidental, les amenant à se couper de ce qui donnait sens à leur vie, ont souvent sombrer dans le désespoir (...). De fait, isolé dans sa bulle, il est possible à tout un chacun de s'adonner sans transition et dans un présent perpétuel, à un jeu de massacre en ligne (...) vagabonder au bout du monde, communiquer avec un inconnu sur un réseau social. Turbulences à l'écran, vide alentour. L'Autre est en passe de devenir une entité abstraite. (...) Le risque est d'être colonisé par une machine. Il est utile de se souvenir que le mot "addictus" - addict - désignait à Rome l'esclave pour dette qu'un édit assignait à un maître.
Traditionnellement, les Batammariba ne portaient pas de vêtements. (...) Dès la fin des années 1970, un décret préfectoral leur interdisait de se montrer en public non vêtus.
Le savant qui a l'heur de déplaire à la nouvelle nomenklentura universitaire n'est jamais attaqué de front: il faudrait lui opposer des arguments étayés par une véritable érudition, un art de la rhétorique, bref, soutenir une vraie polémique, ce dont sont devenus incapables les censeurs de la pensée.
... l'affirmation selon laquelle "tout est dans tout, car nous sommes tous pareils" - pareils à nous, Occidentaux partisans de la mondialisation à outrance - (...) nous invite à croire que sur la surface glacée d'Internet, nous pourrons "communiquer" d'un point de la planète à l'autre sans conflit, dès lors sans surprise. Les trublions qui se soustrairaient à la convivialité internationale ne seraient plus qu'ennuyeux passéistes, trouble-fête non corrects politiquement et, comme est mis à la porte le mauvais élève, voués à une élimination de la scène mondiale à plus ou moins long terme.
Ce qui motive particulièrement les anciens, c'est la protection des aires considérées comme inaliénables et sacrées: les territoires dévolus aux esprits de la terre, domaines de petites brousses ou forêts composées d'espèces végétales rares qu'il est interdit de défricher, de sources ou marigots dans lesquels il est interdit de pêcher. C'est là, dans ces terrains bien arrosés, que les guérisseurs recherchent les racines entrant dans la composition de leurs médicaments. Or, se plaignent-ils aux autorités, "des iconoclastes se permettent d'empiéter sur ces territoires afin d'agrandir leurs champs, avec la complicité de fonctionnaires corrompus. De plus, ils n'hésitent pas à utiliser des pesticides pour attraper les poissons des marigots sacrés".
"Toute théorie qui prétend nous rendre intelligible un phénomène religieux des primitifs en le réduisant aux lois familières de notre psychologie et de notre logique, est par là même suspecte." (Robert Hertz)
(Le souffle du mort. Dominique Sewane. Plon 2020)


Il n'y avait rien à attendre des Blancs, sinon la mort.
Toute civilisation, certes, possède ses païens; mais la nôtre, la chrétienne, n'hésita jamais à entonner son chant de gloire au Dieu que d'autres, au milieu des supplices et des massacres, refusaient d'adorer. A cela aussi il convient de mesurer la vraie valeur de notre monde.
Le monde blanc est tel que l'égalité y est impossible; Jyvukugi avait rapidement compris cela.
Le pouvoir corrompt, a-t-on dit; voilà un risque qui ne guette pas les Indiens, moins par rigueur éthique personnelle que par impossibilité sociologique. Les sociétés indiennes n'étaient pas faites pour cela, et elles en sont mortes.
"Tant de villes rasées, tant de nations exterminées, tant de millions de peuples passés au fil de l'épée, et la plus riche et plus belle partie du monde bouleversée pour la négociation des perles et du poivre! Méchaniques victoires." (Montaigne)
(Chronique des Indiens Guayaki. Pierre Clastres. Plon 1972)


Il n'est pas douteux que les explorateurs, avec leurs présomptueuses certitudes, aient frayé, consciemment ou non, la voie des missionnaires.
Pour peu qu'un "native" remue un harpon, qu'une femme allaite, qu'un chasseur s'apprête à manger du phoque, cinq appareils se braquent et les mitraillent.
"Thulé-Uummanaq, c'était vingt-cinq maisons et nos morts: il y a des siècles et des siècles que nos vieux étaient là... maintenant, c'est tout juste une cabane... Tu as vu cette misère; ces carreaux cassés... parfois une saleté abominable... bon pour les chiens. Voilà ce qu'on nous offre après nous avoir chassés de ce pays…"
... l'Eglise souhaite, dans l'esprit monastique, que chacun devienne serviteur indifférencié de Dieu. (...) En coupant les cheveux "au bol", les pasteurs luthériens obligent les chasseurs à un acte de révérence au nouvel ordre religieux. (...) Au Moyen Age, la coupe au bol est réservée aux manants et aux serfs, par opposition aux chevaliers et aux rois.
... il convient que l'on perde son visage de "païen" pour s'incorporer au nouveau groupe des fidèles chrétiens et que l'on perde toute velléité de résister et combattre.
(Les derniers rois de Thulé. Jean Malaurie. Plon 1989)


... "le massacre d'êtres désarmés entre tous et pour qui la souffrance et la mort furent les seuls dons d'un monde incompréhensible". 
(Anna Langfus. L'Arche octobre 1957)


"J'enverrai ma terreur devant toi; je mettrai en déroute tous les peuples chez lesquels tu arriveras, et je ferai tourner le dos à tous les ennemis."
"Tu dévoreras tous les peuples que l'Eternel, ton dieu, va te livrer, et tu ne jetteras point sur eux un regard de pitié."
"Vous renverserez leurs autels, vous briserez leurs statues, vous abattrez leurs idoles, et vous brûlerez au feu leurs images taillées!"
Malgré ces défroques étrangères, elle n'apparaissait point déplaisante, et Térii déclara, comme cela est bon à dire en pareille occurrence, qu'il dormirait volontiers avec elle. Les autres sifflèrent de mécontentement, ainsi que des gens offensés; et la fille même feignit une surprise. - Pourquoi? - L'homme qui avait récité les noms d'ancêtres se récria:
"La honte même! pour une telle parole jetée ce jour-ci!" Il ajouta d'autres mots obscurs, tels que "sauvage" et surtout "ignorant".
"Deux hommes, pour un seul aujourd'hui. La moitié sont morts depuis vingt ans.
- (...) Mieux vaut la moitié moins d'hommes sur la terre Tahiti, et qu'ils soient bons chrétiens et baptisés, plutôt que le double d'ignorants détestables! (...) mieux ne vaut pas un vêtement piritané décent et digne, même souillé de terre, plutôt qu'une impudique vêture païenne!" Le jeune homme, enfin, comptait le nombre de coupables marqués au front, et qui piétinaient - justement - la route longue et chaude. Il déplorait la montagne vide, les images des Tii en pièces. Et il répandit ses regrets: tout était mort du Tahiti des autrefois...
(Les Immémoriaux. Victor Segalen. Points 1985)


... Béziers (...), cette ville médiévale frondeuse et hérétique que les croisés de Simon de Montfort ont assiégée et vaincue, lors de la croisade des albigeois. Ces hommes pieux y ont perpétré un massacre total, le premier de la grande boucherie qui ensanglanta le Languedoc au cours du XIII° siècle.
... ces catholiques qui avaient brûlé tous les habitants de Béziers sous l'injonction monstrueuse d'Arnaud Amaury: "Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens!"
Ils avaient mis leur trésor dans des jarres et avaient fait creuser de grands trous par des esclaves dévoués. On dit également que dans ces fosses, ils avaient enseveli quantité d'or et de pierreries, puis que, après les avoir étouffés, ils y avaient jeté les esclaves qui les avaient creusés.
... un réveil de nos racines gréco-romaines ou celtiques qui, faute d'avoir été complètement étouffées par vingt siècles de christianisme, ont trouvé dans les cultes de possession venus d'Afrique un espace de liberté et de créativité où le sacré est omniprésent, où la divinité se révèle sous plusieurs aspects et où les dogmes et les interdits ne gouvernent pas la vie.
(Cinq tambours pour deux serpents. Mireille Aïn. Plon 2022)


Ce ne serait plus la recherche du consentement qui importerait, mais l'existence de contraintes multiples et perçues comme "indépassables" par les acteurs sociaux rendant toute forme d'imposition de nature culturelle sans objet. Les individus n'ont plus besoin d'êtres mystifiés par l'idéologie ou par des formes culturelles…
... une gestion des relations professionnelles qui s'est progressivement déplacée de l'Etat vers l'entreprise (...). Une telle évolution au niveau national est indissociable de ce que sont les effets de l'inscription de l'Etat dans un régime supranational où se développe une globalisation, favorisant "l'emprise de la finance sur l'économie (...). L'Etat est alors contraint de redéfinir ses sphères d'intervention pour établir ce que pourrait être un nouveau "bien commun"...
Ces redéfinitions du statut de l'Etat font alors système avec un contexte d'accroissement de la pauvreté, de décroissance des indicateurs de bien-être, de détérioration de la cohésion sociale...


(L'esprit politique des savoirs. Jacques Commaille. Editions de la Maison des sciences de l'homme 2023)


"Lourd de tous les desseins, tu ne pourras pas aller..."
(Solstice païen. Loude, Lièvre, Nègre. Editions Findakly 2007)


Qu’est-ce qui fait le malheur de tout homme ici-bas ? C’est qu’il possède un corps, et qu’il est forcé de l’entretenir, de le protéger contre toute attaque du monde extérieur. Dans ces conditions, il doit affermir son existence en lui subordonnant toutes les natures.
… nous entrons brusquement dans une présence plénière et souveraine, absolument obscure et absolument insondable qui efface tout et absorbe tout.
L’homme ordinaire aime celui qui lui ressemble et déteste celui qui est différent. Celui qui aime la ressemblance et déteste la différence veut, à son insu, surpasser les autres hommes du monde. Mais celui qui cherche à s’élever au-dessus des autres y parvient-il vraiment ? Non certes, car en réalité, c’est lui qui a pris les autres pour modèle, du seul fait que son expérience est obligatoirement moins étendue que celle de tous les autres réunis.
(Oeuvre complète. Tchouang-tseu. Gallimard 1969)


Des plaques d’or décoratives des temples impériaux, ou des statues d’or du Coricancha que les compagnons de Pizarro décrivent ébahis lorsqu’ils pénètrent pour la première fois au Cuzco en 1533, il ne reste rien.
Dans les zones où les colons étaient le mieux implantés, (…) l’évangélisation forcée des populations s’accompagnait d’une obligation de changement profond des coutumes funéraires afin de se conformer aux règles et coutumes de l’Église catholique.
Lorsque Hernando Cortès pénètre sans peur ni précautions dans le sanctuaire, qu’il en ressort avec l’idole sacrée et la brise devant la foule médusée, il ôte en un instant à Pachamamac tout pouvoir et donc toute crédibilité…
Des 9 à 10 millions de sujets que comptait à peu près l’Empire inca au moment du contact, il en restait dix fois moins à la fin du XVIème siècle.
Il ne fallut pas moins de neuf forges actionnées continuellement des mois durant par des artisans indigènes pour transformer en lingots les plats, gobelets, statuettes, bijoux et autres parures et décorations, soit six tonnes d’or et plus de onze tonnes d’argent.
Ces campagnes d’extirpations d’idolâtries se déroulaient sous forme de visites et d’enquêtes de la part d’ecclésiastiques particulièrement zélés, dans les communautés autochtones. Leur mission était de débusquer et d’éliminer les spécialistes rituels (considérés comme des sorciers ayant commerce avec le démon et par voie de conséquence, promis au bûcher), mais aussi de détruire tout ce qui était en rapport avec les cultes païens, au premier rang desquels, les momies ancestrales.
(Les Incas. Peter Eeckhout. Taillandier 2024)


… ce sont les « Sept Sages » (…) qui ont « jeté les bases », les « fondements » de la ville d’Uruk, alors que les remparts en « brique cuite » ont été construits par l’homme-dieu Gilgamesh qui en est le Roi… « … appelant le premier, il lui donna cet ordre : « Où que tu ailles faire rage, sois sans égal ! » (…) au sixième : « Déambule partout, sans épargner personne ! » ; et le septième, il le chargea de venin de Dragon : « Anéantis toute vie ! », lui dit-il. (…) »

(Le matin des dieux. Salvatore D’Onofrio. Editions Mimésis 2018)


La chaîne saoudienne Al-Hadath a dévoilé ce dimanche, citant une "source de haut rang", les détails d'un plan d'évacuation des Palestiniens de Gaza vers trois pays arabes et un pays asiatique. (…) L’idée repose sur un concept bien établi : Transformer Gaza en une "Singapour du Moyen-Orient", une idée qui a été proposé par des hommes d'affaires israéliens et américains au début du conflit, comme une solution possible pour "l’après-guerre". (…) Les camps temporaires dans le Sinaï, près de Rafah ou entre Rafah et El-Arich, pourraient être une option plus réaliste, permettant aux Gazaouis de rester proches de leur territoire tout en participant aux efforts de reconstruction. Cependant, l’Égypte refuse toujours catégoriquement de les accueillir, même temporairement, craignant de nouveaux problèmes sécuritaires et sociaux. Selon ynet, lors de ses discussions avec le roi de Jordanie et d’autres acteurs régionaux, Trump a utilisé une stratégie mêlant promesses d’aides financières massives et menaces implicites de sanctions. 

(i24NEWS 26 janvier 2025)


Trêve à Gaza : les conditions de libération des détenus palestiniens dénoncées par le Comité international de la Croix-Rouge. Les prisonniers palestiniens sortis samedi à la mi-journée, principalement du centre pénitentiaire de Ktzi'ot, dans le désert du Négev, l'ont été dans des conditions qui posent de sérieuses questions. Ils étaient menottés, mains derrière la tête et portaient un bracelet sur lequel était écrit : "le peuple éternel n'oublie pas et pourchassera son ennemi". (…) Ces conditions ne surprennent pas Thair Chritah, membre de la commission des affaires des détenus palestiniens. "Ils sont en mauvaise santé, ils ont été battus, humiliés, ont subi des actes de torture, surtout durant les derniers jours. Pour les forces d'occupation israéliennes, la libération de ces détenus est un aveu d'échec, car certains d'entre eux étaient condamnés à de longues peines, voire, à la perpétuité", rappelle-t-il.
(Radio France. Thibault Lefèvre 1er février 2025)


L’auteur, par conséquent, a l’impression que le docteur-missionnaire réussira beaucoup mieux, à la longue, à introduire la pratique médicale occidentale dans la culture abron.
(La danse de l’araignée. Alexander Alland. France Loisirs 1984)


Je hais les objets, surtout ceux que l’on regarde comme le produit des arts, exilés des relations humaines qui leur donnaient une pleine signification ; les objets en vitrine, aussi impuissants que les morts devant les foules de la Toussaint.
Après la quasi-disparition des Hawaïens (300000 en 1778, 40000 en 1884, et 12000 environ en 1950), et la substitution qui font des îles le lieu de rencontre de l’Extrême-Occident et de l’Extrême-Orient, il devenait inoffensif d’exalter à l’excès la civilisation autochtone.
… le caractère incomplet de ces sociétés urbaines coloniales, qui paraissent pendant longtemps comme des scènes à quatre personnages : le traitant, le fonctionnaire, le soldat et le missionnaire.
Les principes traditionnels d’aménagement des rapports sociaux sont utilisés, mais afin d’assurer la prédominance exclusive de l’église au-delà des différenciations de clan, de génération et de statut. Celle-là intervient de façon à faire prévaloir une sorte de « clan unique » (…) : elle cherche à imposer la cohésion comme le fait le parti unique au sein de certaines sociétés modernes.
Nos églises font prévaloir la vie intérieure et la règle morale sur l’exaltation qui conduit au seuil de la perte de conscience. (…) Lorsque nous privons le Noir des moyens d’expression qui lui appartiennent en propre, nous lui faisons subir la plus lourde des contraintes. Celle que nous aurions pu connaître si nos « occupants », nous avaient dénié tout droit d’écrire, de chanter, de peindre pour nous transformer en simples machines à produire.
« Les Espagnols tuent nos fidèles en Guinée. Les missionnaires détruisent nos reliques… Qui a le droit de nous priver du bonheur de vivre à notre manière ? »
… j’acquis la certitude que toute richesse humaine se dit toujours au pluriel, et que le singulier nourrit le dogmatisme qui porte en lui la violence totalitaire.
(Afrique ambiguë. Georges Balandier. Plon 1957)


Le plan de Trump reflète également ce que certains sionistes chrétiens défendent politiquement depuis des décennies, sur la base d’interprétations spécifiques de la Bible. (…) L’idée de séparer deux peuples irréconciliables est présente dans les discours des sionistes chrétiens. En 1988, en pleine Intifada, William Lovell Hull (1897-1992), un pasteur pentecôtiste canadien et fervent partisan d’Israël, a soumis un plan de paix à Yitzhak Shamir, premier ministre israélien et ardent défenseur du « Grand Israël », et à Joe Clark, secrétaire d’État aux affaires extérieures du Canada.
L’un des principaux mantras des évangéliques sionistes est éminemment transactionnel : « Je bénirai ceux qui te béniront, et je maudirai ceux qui te maudiront. » (Genèse 12 : 3) Dans cette logique, le soutien à la politique du gouvernement israélien (de préférence d’extrême droite), considéré comme le représentant de tous les Juifs, est non seulement un devoir sacré pour son propre salut, mais aussi un devoir patriotique pour le bien de la nation.
Pour certains chrétiens sionistes américains, la puissance économique et militaire du pays est le signe de cette bénédiction divine liée à la relation spéciale avec Israël. (…) De fait, un siècle après le début du mandat britannique, une partie de la Palestine se retrouverait de nouveau entre les mains d’une nation chrétienne (ou présentée comme telle) qui s’est fait un devoir d’aider le peuple juif à restaurer sa souveraineté sur la terre que Dieu lui a promise.
Faire respecter cette promesse divine, c’est justement ce à quoi se sont engagés des chrétiens sionistes au plus haut niveau politique depuis le milieu du XIXe siècle, sans discontinuer.
(Laurent Tessier. The Conversation 27 février 2025)


… le missionnaire Grubb (…), la forme historique de sa présence, son sens de la réalité historiquement déterminé et, de façon médiate, l’ordre culturel qui a fait de lui un homme ainsi déterminé, sont soustraits au mouvement historique et cristallisés en critère absolu, valable pour toutes les époques historiques et pour toutes les civilisations.
… le « prélogisme » [de Lévy-Bruhl] n’est pas une théorie qui interprète et qui explique le monde magique, mais plutôt une réaction typique de la mentalité occidentale, encore prisonnière de ses limites historiques, vis-à-vis de l’aspect incompréhensible du monde.
Puisque, pour nous, l’individu en tant que présence unifiée est une donnée évidente, qui nous accompagne sans risque appréciable dans notre vie quotidienne, et puisque, de toute façon, étant une donnée, il ne constitue pas un problème culturel et un drame historique, Lévy-Bruhl pense qu’il en est de même dans le monde magique (…). En fait, le seul obstacle visible ici, c’est notre présomption culturelle, qui élève à la dignité métaphysique notre mode historique d’être présent au monde.
(Le monde magique. Ernesto De Martino. Bartillat 2022)


Caspar (1953) estime qu’à la fin des années 1920, au moins 3000 personnes habitaient les sources de la rivière Branco (…). En 1934, Emil Heinrich Snethlage se trouve dans le Branco (…) il visite le Sao Luis, rapportant (…) des cas de punitions physiques (…), estimant (…) la population à 250 habitants. (…) En 1955, Franz Caspar visite de nouveau la rivière Branco et rencontre un groupe de réfugiés (…), soit 66 personnes (…). Jusqu’en 1980, les plantations sont vendues entre propriétaires, dont beaucoup font travailler les Indiens dans des conditions proches de l’esclavage. (…) Enfin, en 1983, la réserve autochtone de la Branco est délimitée. Cependant, quelques établissements ont été laissés en dehors de ses limites, dont trois, habités principalement par les Tupari, à l’intérieur de la réserve biologique de Guaporé, délimitée l’année précédente.
Les premières représentations de l’histoire profonde de la région, au milieu du XXe siècle, se concentraient généralement moins sur ce qu’étaient les habitants des basses terres que sur ce qu’ils n’étaient pas ou, plus précisément, sur ce qui leur manquait - (…) l’architecture en pierre, les villes, les animaux domestiques, l’écriture, le surplus, entre autres choses.
… le monde des morts ne parle pas seulement des morts, il parle de la société qui prend soin de ses proches, il parle des pressions sociales et de la recherche de la survie, c’est pourquoi « les efforts missionnaires et l’influence des régions semblent s’être concentrés sur deux champs de bataille, le lieu d’inhumation et l’inhumation secondaire. Aujourd’hui, nous savons (ou comprenons enfin) que cette insistance à modifier les pratiques funéraires est, en plus d’être raciste, une forme de génocide culturel.
(Archéologie de l’Amazonie. S. Rostain C. J. Betancourt. Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme 2025)


Que penserions-nous de porcs qui, étant parvenus à maintenir la justice entre eux, néanmoins exploiteraient sans cesse, et sans l’ombre d’une arrière-pensée à l’effet contraire toute autre créature et tous matériaux épars à travers la planète, et auraient dans leur regard, parfaitement vierge de considérations secondes, la haute et sainte lumière de la science et de la religion.
(Louons maintenant les grands hommes. Agee/Evans. Plon 2017)


La conquête moderne de la Pampa porte les marques de cruauté qui déshonorent la très vantée civilisation actuelle.
Que c’est criminel d’outrager les femmes – même les sauvages -, de dépouiller l’homme de son cheval – son gagne-pain, son transport -, de pervertir la morale des enfants, (…) de semer dans leur esprit la peur et la méfiance, (…) de les emmener par-ci et par là comme un troupeau !
Et les gouvernements, qu’est-ce qu’ils en font ? Rien du tout. Impassibles, ils les voient mourir tout comme César voyait mourir les gladiateurs dans les arènes du cirque… (…) Demandez à ces Mercures abjects ce que c’est que l’Indien, ils vous répondront : « c’est une bête. » Dites-leur : « vous êtes devenus le fléau d’une race », la réplique sera : « les Indiens doivent mourir »
(Une race qui disparaît. Ramon Lista. Interfolio 2019)


« C’est le meilleur spectacle en ville » : sur le promontoire de Sdérot, la vue imprenable et sinistre sur les bombardements de Gaza. Chaque jour, des Israéliens viennent contempler, d’un promontoire transformé en mémorial du 7-Octobre, la guerre qui ravage l’enclave palestinienne et fait, quotidiennement, des dizaines de morts. (...)« Quand je vois et entends un missile qui tombe sur Gaza, je suis heureux », précise Afik, assis tout sourire dans son short et son tee-shirt bariolé, son paquet de cigarettes et son téléphone portable devant lui. (...) Face à ses deux copains, un trader et un employé de la grande imprimerie du kibboutz Be’eri, collé à la bande de Gaza, le jeune homme, « effrayé » par la proximité de la frontière avec l’enclave palestinienne, veut croire que la libération des 50 derniers otages israéliens, dont seulement 20 seraient encore en vie, ne se fera qu’au prix de cette violente opération militaire. Même si « des millions » de Palestiniens doivent mourir, ajoute-t-il. (Lucas Minisini. Le Monde 21 juillet 2025)


Dans le Nord de Gaza, les bébés prématurés luttent pour rester en vie dans des conditions épouvantables. (…) « Au début, deux bébés partageaient la même couveuse, une situation déjà inacceptable et choquante. Très vite, ils ont été trois, puis la semaine dernière ce sont cinq bébés qui ont partagé une même couveuse. Avec les attaques incessantes contre les établissements de santé, il n'y a aujourd'hui que 36 couveuses dans le nord de la bande de Gaza, contre 126 avant octobre 2023. (…) Ce qui est différent aujourd'hui, c'est que les femmes enceintes sont gravement dénutries et souffrent d'anémie sévère. Cela peut entraîner des complications pendant la grossesse, notamment un accouchement prématuré. En plus, elles vivent dans des conditions épouvantables : dans des abris ou des tentes surpeuplés, sans accès à de l'eau propre pour se laver. Nombre d'entre elles n'ont pas accès aux soins prénataux en raison du manque d'infrastructures en état de marche et des déplacements forcés répétés. (…) C'est déchirant. La naissance d'un bébé devrait être un moment de joie et d'espoir, mais aujourd'hui, à Gaza, ce moment n’est plus que stress et peur. » (Dr Joanne Perry )
(Médecins sans frontière. 23 juillet 2025)


Le ministre du Patrimoine, Amichai Eliyahu, a affirmé jeudi qu’Israël poursuivait l’anéantissement de la bande de Gaza et que le territoire serait entièrement transformé en zone juive.
« Le gouvernement est en bonne voie pour anéantir Gaza », a-t-il affirmé à la radio haredi Kol Barama. « Dieu merci, nous éradiquons ce mal. (…) Toute la bande de Gaza sera juive », a-t-il poursuivi, avant de préciser que les Arabes loyaux envers Israël y seraient tolérés. (…) Il a affirmé que l’État hébreu était en guerre et visait à tuer « ces monstres ».
« Il n’y a pas de famine à Gaza », a-t-il déclaré. « Mais ce n’est pas à nous de nous soucier de la faim dans la bande de Gaza. Que le reste du monde s’en occupe. »
(Times of Israël. 24 juillet 2025)


À Gaza, "des gens meurent de faim, tandis qu’en Israël, les supermarchés regorgent de nourriture", s’est indignée, jeudi, l’UNRWA, l’agence de l’ONU chargée des réfugiés palestiniens, affirmant disposer de 6 000 camions d’aide bloqués aux frontières par l’État hébreu qui poursuit un objectif de dépeuplement de l’enclave.
Alors que la population civile, déjà soumise à d’intenses bombardements, meurt de faim et de soif, plus d’une centaine d’organisations humanitaires et de défense des droits humains ont alerté, mercredi, la communauté internationale, exigeant un cessez-le-feu. (…) Fustigeant le blocus total de l’enclave palestinienne et les multiples entraves à l’accès à l’aide humanitaire, les 111 organisations accusent, elles, le gouvernement israélien de Benyamin Netanyahou d’avoir délibérément provoqué "le chaos, la famine et la mort". (…) "Une famine de masse se propage dans la bande de Gaza, nos collègues et les personnes que nous aidons dépérissent", déplorent les ONG internationales. "Les habitants de Gaza ne sont ni morts ni vivants, ce sont des cadavres ambulants", alerte Philippe Lazzarini, le chef de l’UNRWA.
(Midi Libre. 25 juillet 2025)


De nouveau, Antonio Guterres fustige le manque d'"humanité" et de "compassion" à l'égard des habitants de la bande de Gaza, qui traverse non seulement une crise humanitaire mais aussi "une crise morale qui défie la conscience mondiale". "L'ampleur et la portée sont au-delà de tout ce que nous avons vu dans l'histoire récente", a déclaré le secrétaire général de l'ONU, vendredi 25 juillet, lors d'une intervention par vidéo lors de l'assemblée d'Amnesty International. (…) "Rien n'excuse ce qui se déroule à Gaza." Dans un communiqué ce soir, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) appelle à un arrêt immédiat de "la tragédie" qui se joue dans l'enclave palestinienne, dévastée après 21 mois de guerre entre Israël et le Hamas. "Chaque hésitation politique, chaque tentative de justification des horreurs commises sous la surveillance internationale seront à jamais jugées comme un échec collectif à préserver l’humanité en temps de guerre."
(Godet/Pasquesoone. France info 25 juillet 2025)


… il ne faut (...) pas attendre quoi que ce soit de ceux qui sont censés régir ces questions – diplomates, stratèges, fonctionnaires internationaux. Qu’ont-ils à faire, ces gens-là, des icônes, des poussières ? Qu’ont-ils à faire des tentes et des vieillards ? Qu’ont-ils à faire, surtout, des réfugiés quand les morts même les laissent indifférents ?
Contre l’indifférence générale, contre les complots conjugués des grandes puissances impérialistes en Méditerranée orientale (…), contre la présence d’une armée d’occupation installée dans une île qu’elle a violée et mutilée, je n’ai rien, absolument rien (…).
(L’été grec. Jacques Lacarrière. Plon 1975)


Seulement 1,5% des terres agricoles de Gaza sont désormais cultivables, exacerbant le risque d'une « famine généralisée » dans le territoire palestinien dévasté, selon un nouveau bilan satellitaire publié mercredi 6 août par l'Organisation des Nations unies pour l'agriculture et l'alimentation (FAO). (…) Lorsque l'on compare les images satellite de la bande de Gaza sur plusieurs mois, on est saisi par l'ampleur des destructions des bâtiments, mais aussi des terres agricoles, des potagers, des vergers, des serres, rayés progressivement de la carte. On peut voir notamment des terres défigurées par le passage de bulldozers. (…) L'armée israélienne, en plus de ses bombardements intensifs, occupe une partie du territoire palestinien. La population ne peut donc pas compter sur ces productions agricoles locales, alors qu'elle est déjà au bord de la famine, avec le blocage de l'entrée de l'aide humanitaire. « Les gens meurent de faim non pas parce qu'il n'y a pas de nourriture, mais parce que l'accès à celle-ci est bloqué, que les systèmes agroalimentaires locaux se sont effondrés et que les familles ne peuvent plus subvenir à leurs besoins les plus élémentaires », déplore le directeur général de la FAO, Qu Dongyu, cité dans le communiqué.
(RFI. 8 août 2025)