Lorsque les fées de la grotte de la Chanouette (…) avaient dansé au clair de lune, et qu’elles avaient envie de se rafraîchir, elles cognaient sur la pierre sonnante en criant : « Au bon lait ! à la bonne galette ! » et aussitôt, à son extrémité elles trouvaient les mets qu’elles avaient demandés. (…) La formule était plus complète : « Au bon lait ! à la bonne galette ! mon cul brûle ! » (…) elle reproduit exactement le cri dont se servaient, il y a soixante ans, les femmes qui vendaient de la galette dans les rues de Saint Malo et dans celles de Dinan. Je tiens d’une dame aujourd'hui octogénaire, et qui appartient à une des plus vieilles familles de Saint Malo, que dans son enfance, lorsqu’il s’agissait de pénitence de jeux, garçons ou filles devaient aller, en frappant sur une porte du salon, répéter cette formule naturaliste.
Naguère encore, les fiancés de Braye les Pesmes (Haute Saône) se rendaient, le jour de la Chandeleur, à une source sacrée ; ils échangeaient des gâteaux qui représentaient assez sommairement les attributs du sexe de celui qui les portait, puis, après les avoir trempés dans l’eau de la fontaine, ils les mangeaient, et les fiançailles étaient consommés.
A Exoudun, on fait franchir ensemble au marié et à la mariée le petit bassin de la source d’Issernay, et garçons et filles de la noce les aspergent au passage en s’efforçant de leur jeter de l’eau entre les jambes.
Naguère à Carnac, les jeunes filles qui désiraient un mari se déshabillaient complètement et se frottaient le nombril à un menhir spécialement affecté à cet usage (...) en Eure et Loir, elles retroussaient leur jupon et, le soir, se frottaient le ventre contre une aspérité de la Pierre de Chantecoq...
Des paysannes allaient naguère encore, la nuit, dans un bois situé près de Saint Laurent lès Mâcon, et, après s'être dépouillées de tout vêtement jusqu'à la ceinture, elles se frottaient le ventre contre une pierre levée pour avoir des enfants, et les seins pour avoir du lait.
Les jeunes filles, pour avoir un mari, s'assoient au moment de la pleine lune, après avoir relevé leur jupon, sur la table du dolmen ruiné de Cruz Moquen, à Carnac, qui porte le nom de Pierre Chaude. (...) Les filles de Crocq, dans la Creuse, se précipitaient du sommet d'un dolmen.
Vers 1880, non loin de Carnac, des gens mariés depuis plusieurs années, et qui n'avaient point d'enfants, vinrent, au moment de la pleine lune, à un menhir; ils se dépouillèrent de leurs vêtements, et la femme se mit à tourner autour de la pierre, essayant d'échapper aux poursuites de son mari, auquel elle finit pourtant par se rendre...
(Croyances, mythes et légendes des pays de France. Paul Sébillot. Omnibus août 2002)
« L'envie de femme commence à la sœur », dit le proverbe Azandé.
(Nature, culture et société. Lévi-Strauss. Flammarion 2008)
Peut-être la possibilité du bonheur est-elle fonction de la possibilité de rythmer, de drainer l'énergie psychique. Ce qui se passe dans l'amour physique, dans la transe (…) dans la musique, dans le sport (…) Peut-être le bonheur passe-t-il par le fait de lancer ses forces au point qu'elles se développent seules. L'effet de libération que cela entraîne (et la perte de conscience).
(Il y a des dieux. Frédérique Ildefonse. PUF 2012)
... une représentation également caractéristique, celle de la marque "ombilicale" ou "anale" (ou signe du "pouvoir des entrailles" comme l'appelleraient les Zugnis). Grâce à celle-ci, la figure n'est pas une simple effigie de l'aigle, mais devient aussi une amulette ou un fétiche de l'aigle en tant qu'être divin, car ces hommes croyaient (pour des raisons évidentes) que sa représentation était ainsi dotée du pouvoir de perpétuer la vie qu'il acquérait grâce aux offrandes et aux ennemis tués. (Ainsi les effigies zugnis des dieux animaux - les fétiches de la guerre ou de la chasse - sont-elles dotées de cette marque ou du symbole du coeur, ou les deux, pour les rendre puissants ou pour leur ouvrir le "passage de la vie".
(Tenatsali ou l'ethnologue qui fut transformé en Indien. CNRS Editions 2022)
"Je te salue, ô merveilleuse fente
Qui vivement entre ces flancs reluis
Je te salue, ô bienheureux pertuis."
(Pierre de Ronsard. Livret de folastries 1553)
Flora était une divinité agraire, dont les compétences intégraient la sexualité.
... Marc Antoine fonde avec Cléopâtre une association dite des Amimotobies, c'est-à-dire de "ceux qui mènent une vie inimitable" dont les membres, à la fois orientaux et romains, sont censés vivre comme des dieux et des déesses. (...) La reine et son amant vivent dans un luxe inouï, à la recherche du plaisir à tout prix, symbole de dépassement de la condition humaine...
Lors de ses séjours en bord de mer, (...) cette nouvelle Cléopâtre "visitait fort assidûment les sites les plus agréables du rivage, afin de choisir parmi les matelots, qui presque toujours travaillaient nus, les plus capables de satisfaire son infâme lubricité."
(Débauches antiques. Christian Georges Schwentzel. Vendémiaire 2023)
... il est probable que les peuples préhistoriques aient conçu la terre comme une entité féminine, et qu'ils considéraient parfois certaines interactions avec cette figure féminine comme un échange sensuel entre un homme et une femme. Le défrichement du terrain comme une prise de possession, le labour du sillon, la pénétration de la terre ou l'insertion d'un menhir ne sont que quelques exemples d'actes renvoyant à cette analogie. Cette conception, tout à fait étrangère à l'esprit moderne, présente une approche du monde naturel fondamentalement différente, où certaines particularités topographiques pouvaient être envisagées sous un angle animiste.
(L'archéologie et la mythologie celtique. John Waddell. Sidestone 2022)
Ce jour est donc réservé à se libérer des carcans, des prohibitions de la morale contraignante, des interdits et des tabous notamment sexuels (...). C'est une sorte d'orgie collective où les règles sociales sont suspendues et la foule se déchaîne, abuse sans retenue, s'exacerbe et porte au maximum les forces de reproduction et de création de la nature entière.
Grraba est le moment où on célèbre la fécondité de la nature ou de la végétation et des femmes. (...) Les interdits sociaux sont brisés et toutes les règles suspendues. On joue avec des vêtements transparents qui laissent voir les parties intimes dès qu'ils sont mouillés. (...) Quelques jours après cette fête, commence la saison des mariages et le retour aux normes sociales et à l'immobilité à l'image donc du chaos primordial d'où est né l'ordre cosmique. La fête est terminée, l'ordre normal reprend le dessus.
La débauche et la folie se justifient [selon R. Caillois] pour faire le contraire de l'habituel et pour être sûr de retrouver les conditions d'existence du passé mythique.
"... les Mecquois demandèrent à Mahomet de leur montrer un miracle alors il leur montra la fente de la lune." (hadith n°3637)
(Une mythologie berbère. Hassane Benamara. L'Harmattan 2022)
... le serpent, malgré le danger qu'il représente très souvent pour l'homme, est généralement associé dans l'Antiquité (tout comme dans les sociétés traditionnelles) à la sexualité, au bien-être, à l'abondance, à la santé et à la guérison, entendue comme le recouvrement des forces vitales.
"Le rôle du plaisir dans l'expérience religieuse est un aspect des religions anciennes qui a été négligé par les historiens modernes élevés dans la tradition platonicienne et chrétienne: l'idée que l'homme puisse atteindre le même bonheur que les dieux par les plaisirs physiques s'est perdue dans ce long processus de renoncement à la chair et de séparation entre le monde spirituel et le monde temporel. Il est certainement vrai que dans le monde antique dieux et hommes étaient unis dans leurs plaisirs, et divisés seulement par le temps alloués à leur jouissance. (...) L'idée que les hommes et les dieux puissent partager les plaisirs lors d'une fête religieuse n'implique pas la croyance dans le fait que les plaisirs humains sont eux-mêmes divins." (Oswyn Murray)
... le livre de Jérémie nous informe que les femmes judéennes non seulement célébraient [le culte d'Adonis] (qu'elles associaient à la reine des cieux) en plein accord avec leur mari, mais encore qu'elles attribuèrent la chute de Jérusalem et l'effondrement du royaume de Judée à l'abandon de ces pratiques orgiastiques.
(Les graines de l'au-delà. Nissim Amzallag. Editions de la Maison des sciences de l'homme 2023)
A la nuit tombée,, les feux irradient l'intérieur des édifices, et lorsque la vapeur envahit l'habitation, une fois l'eau versée sur des pierres brûlantes, chacun se fustige à l'aide de branchages, au milieu des éclats de rire et des jeux espiègles. (...) une relation amoureuse intime entre l'homme, le "temascal", l'eau et le feu, permettant d'accéder à ce qu'une métaphore de tous les plaisirs du corps dénomme la "découverte de la lumière".
... le geste de l'homme soufflant sur la vulve de sa partenaire, à la sortie de l'édifice, n'est pas sans évoquer la conception ésotérique du vent et de la parole, assimilée à une projection de sperme.
(La moitié du monde. Jacques Galinier. PUF 1997)
... la méticuleuse gesticulation des femmes en vue d'attirer les hommes.
(Dieu d'eau. Marcel Griaule. Fayard 1966)
Une de leurs grandes distractions [aux enfants] était en vérité d'espionner les adultes dans leurs activités privées. Ils guettaient leurs déplacements, les suivaient quand ils s'écartaient dans les bois, les observaient en se cachant et commentaient ensuite longuement, en étouffant leurs rires, ce qu'ils avaient vu. (...) pour eux, le monde adulte était complètement démythifié, sans secret, transparent. (...) sans qu'il y ait chez les "grandes personnes" le moindre exhibitionnisme, on ne tente pas du tout de dissimuler aux enfants le champ de la sexualité...
Pas de goût pour la censure, aucun blâme sur le corps, nul effort pour dissimuler le prix attaché au plaisir: tels consentent à vivre les adultes sous le regard des enfants. On ne cherche pas à les tromper, ils ne s'y trompent pas (...). Les choses en effet sont bien claires: le meno, c'est bon, car les grands le disent; nous aussi on fera aux femmes ce que nos aînés leur font, mais pas avant d'avoir reçu le droit de les imiter (...). Les femmes, c'est pour les initiés.
(Chronique des Indiens Guayaki. Pierre Clastres. Plon 1972)
... Katie Roiphe faisait remarquer que, pour recevoir une attention sexuelle désirée, il faut donner et recevoir parfois une attention sexuelle non désirée...
(Du héros à la victime: la métamorphose contemporaine du sacré. François Azouvi. Gallimard 2024)
Tous ces plaisirs naissaient au hasard des saisons, des êtres ou des dieux, d'eux-mêmes; s'épandaient sans effort; s'étendaient sans mesure: sève dans les muscles; fraîcheur dans l'eau vive; moelleux des chevelures luisantes; paix du sommeil alangui de ava; ivresse, enfin, des parlers admirables...
(Les Immémoriaux. Victor Segalen. Points 1985)
Tout ce qui est humide, il l'a créé de sa semence, et c'est le Soma. (...) Ce monde était alors indifférencié; Il n'est différencié que par nom et forme, on dit: "Il est ce nom, il est cette forme".
La parole en vérité est un preneur. Elle est saisie par le nom, c'est le repreneur, car on prononce les noms par la parole. (...)
Le mental en vérité est un preneur. Il est saisi par le désir, c'est le repreneur, car on désire des désirs par le mental. (...)
... quand un homme meurt, qu'est-ce qui ne le quitte pas? Son nom, dit-il, un nom est sans-fin, et les-tous-les-dieux sont sans-fin.
Et pour celui qui sait ainsi: comme préservation dans la parole; acquisition et préservation dans le souffle-vers-le-dehors et le souffle-dedans; action dans les mains; mouvement dans les pieds; évacuation dans l'anus - ce sont les appellations humaines.
Voici les appellations divines: comme contentement dans la pluie; force dans l'éclair;
gloire dans le bétail; lumière dans les étoiles; descendance, immortalité, félicité dans l'organe génital; totalité dans l'espace.
Feu, en vérité, est l'homme, ô Gautama: son combustible c'est la bouche ouverte; sa fumée le souffle; sa flamme la parole; ses charbons l'œil; ses étincelles l'oreille. Dans ce même feu les dieux offrent la nourriture - de cette oblation surgit la semence.
Feu, en vérité est la femme, ô Gautama: son combustible c'est l'organe sexuel; sa fumée les poils; sa flamme la matrice; ses charbons ce qu'on fait dedans; ses étincelles la jouissance. Dans ce même feu les dieux offrent la semence - de cette oblation surgit un homme.
Ceux qui savent ainsi et ceux qui, dans la forêt, vénèrent la réalité comme confiance, ceux-là atteignent (...) un homme mental, il le conduit aux mondes de Brahman.
(...) Mais ceux qui ne connaissent pas ces deux chemins, deviennent des insectes, des mites et ce qui pique.
C'est pourquoi il faut honorer sexuellement la femme. (...) Son organe sexuel est l'aire sacrificielle; ses poils l'herbe sacrée; la peau les deux pierres à presser le Soma; les deux lèvres de la vulve, le feu qui brûle dedans. Celui qui s'engage dans ce jeu sexuel en sachant ainsi, gagne un monde grand comme le monde que gagne celui qui fait un sacrifice au Soma (pour la vigueur, et il s'approprie le mérite des femmes. Mais celui qui s'engage dans ce jeu sexuel ne sachant pas cela, alors les femmes s'approprient son mérite.
Et pour celui qui sait ainsi: comme préservation dans la parole; acquisition et préservation dans le souffle-vers-le-dehors et le souffle-dedans; action dans les mains; mouvement dans les pieds; évacuation dans l'anus - ce sont les appellations humaines.
Voici les appellations divines: comme contentement dans la pluie; force dans l'éclair;
gloire dans le bétail; lumière dans les étoiles; descendance, immortalité, félicité dans l'organe génital; totalité dans l'espace.
(Les Upanisad. Alyette Degrâces. Fayard 2014)
Une fois, alors que ni Chico ni moi n'avions pu comprendre ce qu'il disait (...), il s'était levé de son siège et, saisissant ma braguette, il en avait défait les boutons en souriant, puis, après m'avoir craché dessus, il avait dit, tout en me reboutonnant: "Maintenant, tu vas comprendre ce que je dis. (...)" C'était une magie efficace...
Les Indiens pensent à l'amour (et aux fonctions physiologiques qui s'y rapportent) non seulement comme à un divertissement agréable mais encore comme à une force de nature spirituelle et contagieuse qui, si on en fait mauvais usage, peut avoir les mêmes effets qu'un poison. (...) pour les Indiens, les fruits sont le résultat d'une activité sexuelle, (...) [et] d'une transformation, qui procède en réalité d'un acte continu, et non d'un acte unique. L'activité sexuelle est ce qui fait pousser les choses; elle est magie. La vraie magie n'est pas l'acte sexuel lui-même, mais le désir de transformer qui se cache derrière: ce qui, pendant l'acte, le déborde jusqu'à contaminer le monde environnant. Faire l'amour avec une femme sous un arbre fruitier équivaut à charger excessivement cet arbre d'une magie de croissance qui nuira aux fruits en train de mûrir...
[Le prisonnier] est venu d'une autre tribu, et on le marie de force, ce qui fait de lui un tobajara dans les deux acceptions du terme. Il a également le droit de courtiser n'importe quelle femme, à condition qu'elle ne soit pas mariée. Certains faits laissent supposer que ces avances sont favorablement accueillies par les intéressées, et même par leurs parents: le futur héros culturel possède une force bénéfique qu'il est sage de ne pas laisser sans emploi.
(Aimables sauvages. Francis Huxley. Plon 1980)
Parfois, on l'identifiait à la fatalité du Sort; d'autres fois, on voyait en lui une lumière ou un feu primitif, et l'une et l'autre conception permettaient de le rapprocher de la Cause suprême des stoïciens, chaleur partout répandue et qui a tout formé, et qui, considérée sous un autre aspect, était la Destinée. (...) Le premier principe (...) procréait un couple primordial, le Ciel et la Terre, et celle-ci, fécondée par son frère, enfantait le vaste Océan...
(Les Mystères de Mithra. Franz Cumont. WW 2023)
Les dieux aiment cet accord entre le grivois et le sacré (...). La santé, la protection, la prospérité dépendent de leur bon plaisir et ce dernier naît des excès humains, ferveur et rires confondus. (...) Les pensées, claires dans les vallées, s'obscurcissent dès l'atterrissage en France quand nous retrouvons les mille difficultés de dire ici l'importance d'une harmonie, ailleurs.
Un prêtre du culte de Murkhum, la divinité caprine équivalente de la déesse kalash Koshumaï, dansait nu, une fois l'an, devant les femmes du groupe et jouissait de droits sexuels sur elles à cette occasion. Il était appelé "mâle du troupeau de femmes".
(Solstice païen. Loude, Lièvre, Nègre. Editions Findakly 2007)
Le cheval de trait (souhaite) un char facile,
les séducteurs, un sourire,
le membre viril, une fente poilue...
La grenouille souhaite de l'eau.


Tel qui a des yeux n'a pas vu la Parole,
tel qui a des oreilles ne l'entend point.
Pour tel autre, elle a ouvert son corps,
comme fait pour son mari l'épouse consentante, bien parée.


Cet univers n'était qu'onde indistincte.
Alors, par la puissance de l'Ardeur, l'Un prit naissance,
principe vide et recouvert de vacuité.
Le Désir en fut le développement originel,
désir qui a été la semence première de la Conscience.
(Hymnes spéculatifs du Veda. Louis Renou. Gallimard 1956)
... les trois oblations consécutives sont chez l'homme les trois parties du sexe mâle. Et la plus longue des trois récitations qui accompagne ces oblations est la partie la plus longue du sexe mâle.


Qui n'a point de fils ne va pas au ciel!
cela, même les animaux le savent:
c'est pourquoi chez eux le fils monte
sa propre mère, ou bien sa sœur.


Il est large, il est précieux, le chemin
où vont, sans danger, ceux qui ont des fils!
Bêtes et oiseaux le convoitent;
pour l'avoir ils font l'amour avec leur mère!
(Mythes et légendes extrait des Brâhmanas. Jean Varenne. Gallimard 1967)
Le symbolique du santal marie à la fois le spirituel et le sexuel dans une union qui, en Inde, berceau du tantrisme, ne choque personne. Le santal aide à éveiller la kundalini à partir du chakra racine, cette énergie primordiale que l’on représente souvent en serpent remontant le long de la colonne vertébrale.
(Arbres sacrés du monde. Aurélie Valtat. Editions Eyrolles 2025)


Autrefois, le jour de la Chandeleur, il revenait aux jeunes couples de fiancés de déposer (ou planter) les coupelles de « blé de la Sainte Barbe » dans les coins des champs où les germes de blé commençaient à germer. Cela avait lieu au crépuscule afin qu’ils puissent se soustraire à la vue des autres et pour que la lune éclaire leurs échanges amoureux. D’où la belle expression provençale : « faire du blad de luno essen », « faire du blé de lune ensemble », c’est-à-dire « faire l’amour ». (…) le rapprochement biologique des corps – et notamment de leurs fluides vitaux – s’établit par-delà l’éveil de la nature que le rituel met en scène. (…) Le passage de l’obscurité au clair de lune encadre ces processus dans les rythmes du cosmos, véritable épiphanie des puissances non-humaines qui agissent dans le monde.

(Le matin des dieux. Salvatore D’Onofrio. Editions Mimésis 2018)


Les agaceries sexuelles font le bonheur des adolescents : une bande de garçons se jette sur une ou plusieurs filles pour la déshabiller devant ses amies. Les filles ripostent à coups de pieds et de dents, et parfois l’une d’elles parvient à déshabiller un garçon. Sinon, toutes se contentent de fuir en lançant des insultes. (…) Hommes et femmes mariés surveillent ces jeux, prêts à intervenir si une bataille dégénérait.
(La danse de l’araignée. Alexander Alland. France Loisirs 1984)


… jusqu’à la huitième ou neuvième année, la sexualité de l’enfant ne rencontre-t-elle guère de contraintes ; elle ne fait que s’exaspérer lors de la puberté pour être aussitôt domestiquée par les épreuves de la circoncision.
Il n’est guère de peuple noir, vivant selon la tradition, où ne se manifeste cette succession de la licence apparente et de la contrainte sévère.
La circoncision ritualisée donnait, à un moment précis, accès à la vie sexuelle normale ; elle entraînait des contraintes qui domestiquaient la puissance du jeune mâle alors intégré au groupe des hommes.
Dans le village lébou, ce sont les « sociétés d’âge », associations rassemblant tous les garçons ou filles ayant approximativement le même âge, qui établissaient les premiers ajustements entre sexes. Chaque année, vers la fin de la saison sèche, une réunion mixte permettait de former des couples pour lesquels une sorte de jeu, qui ne restait pas toujours platonique, constituait un apprentissage des relations de coopération devant prévaloir entre hommes et femmes.
(Afrique ambiguë. Georges Balandier. Plon 1957)


« Je suis celui qui a créé l’eau et Mehet-Ouret est venue à l’existence, qui a créé le taureau pour la vache et le plaisir sexuel est venu à l’existence. »
« J’ai vu Râ qui a été mis au monde hier des fesses de Mehyt-Ouret. »
(Lettres égyptiennes. Michel Dessoudeix. Actes sud 2025)


« Venir à l’existence en tant que Khépri, se dresser vers l’horizon, entrer dans l’ouverture de la naissance, émerger de la vulve, apparaître à la porte à deux battants lors de l’heure appelée « Celle qui fait que la beauté de Ré apparaît » (la première heure du jour) afin de revivifier l’humanité et toute créature qui marche ou qui rampe, qu’il a créée. » (Livre de la nuit) La porte à double battants de l’horizon peut également désigner les cuisses de la déesse Nout.
(Le papyrus des sept propos de Mehet Ouret. Yvan Koening. Institut français d’archéologie orientale 2024)


Au regard de Prajapati, cependant, les dieux, ses créatures, ont une beauté parfaite, puisqu’en les contemplant il est tellement ému qu’il laisse jaillir son sperme. Il a du reste la même réaction quand il voit sa propre image reflétée dans l’eau.
… Dan, serpent python et arc-en-ciel, messager unissant les êtres et le monde, symbole de fécondité dont deux avatars s’identifient l’un au cordon ombilical qui conduit l’enfant jusqu’au sol où la mère accouche, l’autre au pénis dont il est le produit et que symbolise en retour le palmier hô-de.
Les pierres, en particulier celles de forme phallique, sont habitées de force, elles possèdent une efficacité miraculeuse dont tire profit la tradition populaire dans les demandes de grossesse, d’un accouchement facile, etc. Dans ce contexte, mentionnons encore les ishigami placés au bord de la route ou aux carrefours qui prennent d’habitude la forme d’un couple s’enlaçant ou s’accouplant (…), voilà l’expression d’un rapprochement entre la sexualité humaine et la fertilité des champs.
(Corps des dieux. SSLD Malamoud/Vernant. Gallimard 1986)
Car, dit l’un des plus vieux mythes égyptiens sur l’origine du monde, le mot et les organes qui le profèrent (langue, dents et bouche) sont la forme sonore et vibrante du sperme et des mains : eux aussi peuvent engendrer et façonner. Ici, ce n’est plus de sens qu’il s’agit (…) mais du son lui-même, de son énergie vibratoire, de sa profération.
(L’été grec. Jacques Lacarrière. Plon 1975)


… à l’époque ancienne les divinités se montraient pour le moins peu soucieuses ou irritées d’une présumée impureté attachée aux règles (…). L’étang du sang désigne un endroit dans les enfers où sont punies les avorteuses, mais où tombent aussi les femmes mortes en couches. C’est donc un endroit impur que nuit après nuit, la lune [= métaphore homophonique pour le sang menstruel de la femme] rejoint, sans jamais y perdre de sa pureté.
(La sieste sous l’aile du cormoran. H.O. Rotermund. L’harmattan 1998)