C'est vrai, je portais des vêtements, des chaussures, une montre, des lunettes. Je voulais imiter les Blancs. Mais à l'intérieur j'étais toujours un Yanomami et je continuais à rêver avec les xapiri.
(La chute du ciel. Davi Kopenawa. Plon 2010)


... les démons doivent donc toujours s'efforcer (...) de s'immiscer dans les créatures qui existent selon l'état visible-corporel (...), car ils ne peuvent participer à cet état que de manière pour ainsi dire parasitaire. (...) les croyants doivent être constamment sur leurs gardes pour ne pas les laisser s'approcher d'eux (...).
Le corps humain, que certains textes considèrent comme un microcosme, un monde en miniature, est le théâtre où se déroule ces affrontements.
(Zarathoustra et sa religion. Michael Stausberg. Les belles lettres 2022)


Endosser un costume, qu'il travestisse ou non, qu'il masque une identité sociale ou la mette au contraire en exergue, participe pleinement d'une mise en condition.
(Au plaisir des dieux. Adeline Grand Clément. Anacharsis 2023)


... les messages culturels généralisent les conduites de restriction alimentaire dès l'adolescence et multiplient les mesures de contrôle du corps et de ses formes. La morphologie est alors de plus en plus considérée comme le fruit d'un travail, l'indicateur d'une compétence, un signe de distinction. Il faut mentionner la culture adéquate et l'argent nécessaire à la beauté. Par rapport au hasard biologique, riches et pauvres se répartissent selon une échelle de beauté. (...) Le traditionnel dualisme corps/esprit fait place au dualisme contemporain qui distingue l'homme de son corps. Le corps est instrumentalisé, il est perçu comme une matière à travailler. Cet imaginaire du corps suit le processus d'individualisation qui marque les sociétés occidentales depuis la fin des années soixante.
Face à cette désymbolisation du monde, à la perte de repères sociaux rassurants, le corps devient un refuge, une valeur ultime, ce qui explique l'investissement croissant qu'il suscite. Face à l'effacement du lien social, il s'opère un mouvement de retour sur soi et le corps devient le seul repère. (...) L'agencement de signes corporels marque une identité sociale dans la recherche d'une unité en tant que sujet.
(Ethnosociologie du corps dans les pratiques et les rituels chez les Bandjoun de l'ouest-Cameroun. Raymond Charlie Tamoufe Simo. Connaissances et savoirs 2017)


Traditionnellement, les Batammariba ne portaient pas de vêtements. (...) Dès la fin des années 1970, un décret préfectoral leur interdisait de se montrer en public non vêtus.
(Le souffle du mort. Dominique Sewane. Plon 2020)


Il entendait que mettre un vêtement c'était se couvrir des paroles du Nommo de rang sept. Il entendait aussi, et surtout, que mettre des parures, pour une femme c'était se travestir en Nommo Septième.
(Dieu d'eau. Marcel Griaule. Fayard 1966)


L'habillement des femmes a changé depuis que le père leur a imposé l'usage des sous-vêtements. Elles portent la blouse montant jusqu'aux oreilles et à la jupe à la cheville.
(Les barrières de la solitude. Luis Gonzalez. Plon 1982)


Fière, ma Groenlandaise bombe son petit corsage ajouré, met en valeur sa robe qui craque aux coutures et laisse volontiers entrevoir, entre les pressions, des tranches de combinaison rose saumon. Pour une évoluée, c'est de bon goût. Avoir du linge de corps, n'est-ce pas déjà un signe de richesse?
(Les derniers rois de Thulé. Jean Malaurie. Plon 1989)


Le Dieu Un qui, selon sa nature, se couvre lui-même telle une araignée avec des fils issus de la nature non-manifeste...
(Les Upanisad. Alyette Degrâces. Fayard 2014)


"Naturellement, j'ai été assimilé aux gardiens de la tradition. La robe m'en confère l'insigne et le rôle."
(Solstice païen. Loude, Lièvre, Nègre. Editions Findakly 2007)


"La vedi est femme. Les dieux sont assis autour d'elle, et aussi les brahmanes qui ont étudié et qui enseignent le Veda. Et comme ils sont assis autour d'elle, le sacrifiant veille à ce qu'elle ne soit point nue."
(Le jumeau solaire. Charles Malamoud. Seuil 2002)


... un certain tabou de l'Inde ancienne qui interdisait aux rois de marcher pieds nus, pour que leur puissance ne se disperse pas dans la terre. (...) on trouve un autre exemple dans une statuette de bronze représentant Mercure, dont le pied gauche est chaussé tandis que le droit reste à nu. S'il s'agit, comme cela a été dit, d'une représentation de Mercure en dieu psychopompe "guide des âmes" conduisant les morts vers l'Au-delà, le lien avec l'Autre Monde est évident.
(L'archéologie et la mythologie celtique. John Waddell. Sidestone 2022)


Les Incas ont tenu à préserver l’identité vestimentaire propre à chaque peuple et il était d’ailleurs formellement interdit d’en changer. Au-delà du respect pour les traditions locales, c’était évidemment une façon commode d’identifier au premier coup d’œil l’origine des voyageurs (…). Le vêtement participe ainsi d’une forme de stratégie de contrôle impérial.
On abandonnait sur place les vêtements portés avant certains rites de purification.
(Les Incas. Peter Eeckhout. Taillandier 2024)


La tenue de travail des femmes est plus uniforme : une simple pièce de tissu fréquemment lavée, drapée au-dessus des seins ou parfois à la taille. Une ceinture de plusieurs rangées de perles sur les hanches remplace ici les sous-vêtements. Les petites filles en reçoivent une à leur naissance (…). Quand elles ont deux ou trois ans, on place entre leurs jambes un morceau d’étoffe (dont les extrémités sont glissées sous la ceinture) mais ce dernier sera abandonné quand elles seront devenues adultes – sauf pendant leurs règles. (…) Les petits garçons vivent nus la plupart du temps. (…) Les écoliers, eux, arborent l’uniforme institué par le gouvernement...
(La danse de l’araignée. Alexander Alland. France Loisirs 1984)


Le fait qu’un dieu cherchant figure puisse adopter la tenue de ses prêtres donne aussi à réfléchir. Au fond, on dirait que, même anthropomorphisée et fabriquée suivant tous les canons du « paraître », l’image cultuelle se réduit, non pas à ce corps anthropomorphe qui lui sert de support, mais plutôt aux insignes, aux vêtements et aux rites qui prennent place autour d’elle, à sa surface, à l’extérieur de ce corps qui n’est souvent qu’une charpente creuse dite acrolithe.
… kami serait plutôt dérivé de kakuri-mi [« corps cachés »], traduisant ainsi directement l’aspect essentiel de la nature des divinités japonaises : celui d’être invisibles aux regards humains.
… dans les biographies, ce qui apparaît sous le croisement des regards, sous les yeux fixés sur l’autre pour deviner son secret, sa faute et sa sainteté, c’est le corps féminin, seul présent, mais sur le mode de l’absence, du passé, de ce qui est mort (…). Seule l’autre peut dire le corps de l’autre, faire état de qu’elle a vu, entendu, lu, rêvé, au cours d’une vie passée dans l’espace clos du couvent où chacune est regardante et regardée, à la dérobée.
… Jésus-Christ, en imprimant « son nom autour de son cœur », lui donne de prolixes leçons, son Nom devenant l’acrostiche de pieuses devises ; bavardes, les « significations » s’accrochent à ce Nom, selon le mot du confesseur de la Mère Clément ; le corps de la religieuse est perdu sous les paroles. (…) Ce n’est que dans les biographies intimes,non publiques, que se poursuivent, incompréhensibles et inacceptables, les expériences de l’amour qui, réelles, s’inscrivent sur le corps.
(Corps des dieux. SSLD Malamoud/Vernant. Gallimard 1986)