… dans le Nord-Est de la Sibérie, chez les Tchouktches notamment, les hommes-chamanes affectent de devenir progressivement des femmes et finissent par se comporter entièrement comme telles et (…) dans les récits de l'Amérique du Nord, (…) le sorcier civilisateur qui commence sa carrière sous un déguisement rituel, reçoit de son initiateur le don suivant, qui n'est certes pas considéré comme une tare par le récitant ni par les auditeurs : « Aie des règles, comme les femmes ! »
(Romans de Scythie et d'alentour. Georges Dumézil. Payot 1978)


Tous les êtres, divins ou terrestres, doivent leur constitution à une déesse originelle, aquatique, chaotique, monstrueuse. Sa nature initiale a été conservée dans la partie inférieure du cosmos, la partie supérieure ayant pour sa part acquis des caractéristiques masculines.
Les dieux du haut et du bas étaient des fragments du corps divisé de la déesse, et leur union était une violation de la séparation originelle.
(…) de l'union des dieux du ciel et de l'inframonde naquit le cours du temps.
La mort appartient elle aussi au domaine du froid et de l'humide et elle est régie par le principe féminin. Le Soleil, qui est masculin et symbole de vie, doit périr un jour à cause d'un déluge. En revanche, la Lune – qui gouverne la vie et la mort par le biais de ses renaissances périodiques – rend éternel le principe féminin.
(Les paradis de brume. Alfredo Lopez-Austin. Maisonneuve et Larose 1997)


Elle n'arrive pas à comprendre qu'un artiste ne parle pas pour ne rien dire et n'écoute pas les bavardages inutiles.
(Requiem pour un autre temps. Krishna Baldev Vaïd. Infolio 2012)


La couvade sud-américaine est typiquement fondée sur la croyance de l'existence d'un lien puissant entre le père et l'enfant, lequel empêche le premier de faire quoi que ce soit pouvant nuire au second, jusqu'à ce que celui-ci soit assez fort pour supporter la tension ou échapper au danger.
(Ecrits d'Amazonie. Alfred Métraux. CNRS Editions 2013)


... dissocier, pour la reine, sa dimension humaine de sa dimension divine, là où elles fusionnent pour le roi...
(Dieux et hommes, modèles et héritages antiques, volume I. Jacques Bouineau. L'Harmattan 2018)


Cette profusion constitue un défi lancé à l’éthique locale de partage. (…) on le somme de distribuer ses biens. En les gardant pour lui, il viole une des règles les plus élémentaires de la sociabilité. L’enjeu dépasse celui de la générosité ; c’est aussi parce que la masculinité est symboliquement associée, chez les Sioux, à l’immatérialité, que les convenances exigent du riche voyageur qu’il se défasse de ses effets et les distribue autour de lui.
A l’instar des hommes âgés et des chamanes, les Européens ont la réputation de transmettre leurs pouvoirs aux jeunes hommes en couchant avec leurs épouses, qui sont les médiatrices de la puissance spirituelle. (…) Ils s’assemblent dans la « grande cabane » centrale du village, un bâtiment de 50 mètres de circonférence pouvant accueillir jusqu’à 500 ou 600 personnes.
(L’Amérique fantôme. Gilles Havard. Flammarion 2019)


... une distinction entre magie savante (pratiquée surtout par les hommes) et magie quotidienne (pratiquée surtout par les femmes) s'est lentement établie dans les consciences.
(La sorcellerie chez les Hébreux. Michaël Martin. Contes et légendes août 2019)


… la Terre femelle possédait-elle au Paléolithique un pendant masculin dans le ciel ? La répartition différenciée des phallus et des vulves pourrait notamment illustrer une opposition entre le mobile, le léger – l’art mobilier, le ciel – et le lourd, le difficile, voire impossible à porter – l’art pariétal, la Terre.
« … le geste devenu pour nous insignifiant d’enflammer un combustible en approchant une allumette perpétue, jusqu’au cœur de notre civilisation mécanique, une expérience qui, pour l’humanité entière jadis et de nos jours encore pour d’ultimes témoins, fut ou reste investi d’une gravité majeure, puisqu’en ce geste s’arbitrent symboliquement les oppositions les plus lourdes de sens qu’il soit donné à l’homme de concevoir, entre le ciel et la terre dans l’ordre physique, entre l’homme et la femme dans l’ordre naturel, entre les alliés par mariage dans l’ordre de la société. » (Lévi-Strauss 1971)
(Cosmogonies. Julien d’Huy. La Découverte 2020)


... ce groupe de guerriers composé principalement de jeunes hommes célibataires sans terres, reflète de manière romancée une institution masculine autrefois très répandue dans le monde indo-européen.
(L'archéologie et la mythologie celtique. John Waddell. Sidestone 2022)


... la fonction sociale du sorcier est d'enfreindre les lois de la nature dans l'intérêt de la collectivité à laquelle il se rattache. A ce titre, il ne saurait s'y soumettre totalement lui-même, et un chamane particulièrement puissant ne peut se rattacher pleinement aux catégories naturelles que sont le sexe masculin ou féminin.
(Mythologie comparée eurasiatique des Tchouktches. Alexandre Avon. L'Harmattan 2022)


Mettre au monde des enfants était le devoir de l'épouse, tandis que le mari assurait, de son côté, la défense de la cité. Deux missions également risquées: la femme qui meurt en couches peut être comparée à l'homme tué alors qu'il défend sa patrie.
(Débauches antiques. Christian Georges Schwentzel. Vendémiaire 2023)


Ainsi, depuis des millénaires, Orion poursuit les Pléiades comme une parallèle en poursuit une autre: jamais éloignée mais toujours séparée.
(L'aube des mythes. Julien d'Huy. La Découverte 2023)


Parmi les conjointes possibles, la femme désirable se définira tant par cette vertu d'acquiescement tacite aux obligations de sa charge que par sa conformité aux canons indigènes de la beauté physique. Symétriquement, et pour une femme, le "penke aishmank" ("l'homme complet") est celui qui non seulement satisfait les besoins biologiques de son épouse (sexuels et carnés), mais aussi qui contribuera, par sa prééminence dans la guerre, à établir le prestige de sa maisonnée tout entière.
... la division achuar de la division du travail n'engendre ainsi aucune conception d'une disparité hiérarchisée entre les sexes. Non seulement le jardinage n'est pas dévalorisé par rapport à la chasse, mais la capacité des femmes de se reproduire symboliquement comme cultivatrices est largement indépendante du contrôle masculin. (...) Divisés par les configurations idéelles de leurs pratiques respectives, hommes et femmes se rencontrent néanmoins dans les espaces complémentaires où ces pratiques se réalisent, en forêt, dans la conjonction immédiate d'une quête pimentée d'érotisme, et au jardin, dans la conjonction successive des étapes qui mènent à la domestication végétale.
La pratique quotidienne des Achuar confirme pleinement cette idée qu'il existe une correspondance entre les modes de traitement de la nature et les modes de traitement d'autrui. (...) la distinction entre la chasse et le jardinage s'alimente d'une opposition entre deux types de sociabilité: le maternage consanguin exercé par les femmes sur les plantes cultivées et la séduction affinale du gibier à laquelle s'emploient les hommes.
(La nature domestique. Philippe Descola. Editions de la Maison des sciences de l'homme 2019)


La mort de l’homme dans sa partenaire va engendrer une nouvelle naissance, car deux êtres vont, pour un temps, cohabiter dans le même corps féminin.
… les femmes possèdent le contrôle des forces surnaturelles. Elles ne font qu’un avec le Maître du monde, le diable, accumulant ainsi en elles toute la richesse de l’univers. (…) cette surpuissance met en péril la cohésion de la société, de l’ordre communautaire, dont les hommes sont garants.
(La moitié du monde. Jacques Galinier. PUF 1997)


... une unité familiale élargie se dit, en dialecte local, "Mvam = ventre" terme systématiquement employé pour exprimer l'idée de branche familiale ou de souche dans le partage de terres. L'enfant sorti du ventre de sa mère appartient aussitôt à un autre ventre, d'où l'importance des pratiques corporelles et des représentations relatives à l'attache du cordon ombilical "Ntoün" qu'est le nombril situé exactement au milieu du ventre. (...) S'agissant du placenta, il se présente comme une substance nourricière, unissant charnellement et vitalement la mère et l'enfant, avant que celui-ci fasse son entrée d'une part dans la société des hommes au sens générique du terme, d'autre part dans l'univers de la culture ordonné par les hommes au sens masculin du terme.
Dans un tel contexte culturel, on comprend que l'enterrement de ce "noyau = Ntoün" ou du placenta, continue d'être une tradition particulièrement signifiante.
(Ethnosociologie du corps dans les pratiques et les rituels chez les Bandjoun de l'ouest-Cameroun. Raymond Charlie Tamoufe Simo. Connaissances et savoirs 2017)


Une mission catholique installée chez les Shilluk au sud du Soudan perdit jadis tous ses fidèles le jour où les missionnaires ne tinrent pas compte du refus des garçons de bousiller les murs intérieurs d'une maison: selon la tradition, seules les femmes étaient autorisées à faire ce travail.
(Les Arabes des marais. Wilfred Thesiger. Plon 1983)


Dans l'union, l'homme ensemence. Il est comme un génie de l'eau qui fait pleuvoir l'eau fécondante sur la terre et la femme, sur les graines des semailles. Ainsi se trouvent liés l'acte agricole et l'acte conjugal.
L'homme actuel est le chacal creusant la fourmilière, à la poursuite de la fourmi, avatar de la Terre. La femme est la mère incestueuse qui s'avoue finalement vaincue par plus fort qu'elle et qui s'unit à son fils.
En parlant à une femme on la féconde. Ou du moins en introduisant en elle un germe céleste, on la met en état d'être humainement fécondée.
Le même verbe, qui prédisposait les matrices à l'union, attirait les hommes dans les plis du pagne dont chaîne et trame enserraient dans leurs fils les paroles des huit ancêtres.
Donc l'enfant arrive au monde nanti de deux principes de sexes différents (...). Pratiquement, la société, par anticipation, lui reconnaît dès l'abord le sexe qu'il porte en apparence. Toutefois, par des détails du symbolisme, l'androgynie spirituelle reste présente.
(Dieu d'eau. Marcel Griaule. Fayard 1966)


S'ils restent sur place, la misère sera leur compagne et personne d'autre puisque les femmes s'en vont.
Elles se contentent de tuer en paroles, laissant aux hommes le soin des actes.
(Les barrières de la solitude. Luis Gonzalez. Plon 1982)


Le passage, clairement indiqué dans le mythe, de l'animalité à l'humanité s'opère donc par l'abandon de l'habitat pré-humain, du terrier, et par l'ascension de l'obstacle qui sépare le monde animal inférieur (le bas) du monde humain de la surface (le haut): l'acte de "naissance" des premiers Guayaki fut une montée qui les sépara de la terre. (...) La femme hisse l'enfant, l'arrachant ainsi à la terre où il était laissé à gésir: métaphore silencieuse de cet autre lien que l'homme a tranché, il y a quelques instants, de son couteau de bambou. La femme libère l'enfant de la terre, l'homme le libère de sa mère. Texte et image, le mythe d'origine et le rituel de naissance se traduisent et s'illustrent l'un l'autre, et les Guayakis, pour chaque nouveau-né, répètent sans le savoir le discours inaugural de leur propre histoire dans ce geste qu'il faut lire comme on écoute une parole.
... un lien nouveau (...) qui unit l'homme au nouveau-né et qui, d'un époux d'une femme, fait le père d'un enfant. C'est de sa présence qu'émane l'aura plus vive de danger qui fait l'angoisse envahir l'âme du père, et celui-ci entrer en lice dans les fourrés obscurs.
... ce soir, ils ne font plus partie du groupe, ils n'appartiennent plus au monde des femmes, ils ne sont plus à leur mère; mais ils ne sont encore des hommes, ils ne sont de nulle part, (...) frontière sacrée entre un avant et un après pour ceux qui vont à la fois mourir et renaître.
Tant qu'on n'est pas initié, tant qu'on ne porte pas le labret, on n'est qu'un embogi, un pénis. Mais c'est justement à partir du moment où, porteur de labret, le jeune homme passe au groupe des betagi et cesse d'être embogi, c'est alors précisément qu'il peut se servir de son pénis et séduire les femmes (...) l'homme, c'est son sexe, et le moment où un kybuchu n'est plus qualifié par son pénis, c'est bien celui où l'on reconnaît qu'il en a un. Double et même dissimulation du langage qui nomme la chose absente et la masque présente: on est un pénis tant qu'on n'en a pas, on cesse de l'être dès qu'on en possède un.
Là-même gît le secret, et le savoir qu'en ont les Indiens: l'excès, la démesure sans cesse tentent d'altérer le mouvement des choses, et la tâche des hommes, c'est d'oeuvrer à empêcher cela, c'est garantir la vie collective contre le désordre. On ne peut être à la fois enfant et adulte, kybuchu et séducteur de femmes, c'est l'un ou l'autre, l'un après l'autre, d'abord on est Pénis, ensuite Labret: on ne doit pas laisser les choses se confondre, les vivants ici, les morts là-bas, les enfants d'un côté, les initiés de l'autre.
... sans cette lutte des hommes contre les femmes qui voit la défaite de ces dernières, sans tout cela l'initiation ne serait pas complète.
Chachugi a craint de devenir une grande personne, une Aché véritable, elle a voulu rester "femme nouvelle".
Mais est-ce possible cela, n'être ni une personne de l'arc, ni une personne du panier? (...) Il ne pouvait plus se déployer pour lui, cet univers neutre. Quand on est adulte, c'est l'un ou l'autre, homme ou femme, arc ou panier; rien entre les deux, pas de tierce possibilité.
(Chronique des Indiens Guayaki. Pierre Clastres. Plon 1972)


On sait que les filles se disputent tous les mâles qu'un dieu, il n'importe lequel, anime et rend puissants.
(Les Immémoriaux. Victor Segalen. Points 1985)


Si quelqu’un a le désir du monde des femmes, par sa seule intention surgissent les femmes. Et associé au monde des femmes, il se réjouit.
Il devint aussi grand qu'une femme et un homme étroitement enlacés. Il coupa ce même corps en deux: alors advint l'époux et l'épouse. C'est pourquoi Yajnavalkya dit: "Ce qui est à soi est comme la moitié d'une part. Aussi cet espace-ci est-il empli par la femme. Il s'unit à elle, de leur union naquirent les êtres humains.
Et elle se fit cette réflexion: "Comment m'ayant engendrée de son corps, s'est-il unit à moi? Allons, que je me cache!" Elle devint vache, lui taureau. Il s'unit à elle, de là naquirent les vaches. (...) Ainsi, il créa chaque chose qui est par couple jusqu'aux fourmis.
Père, mère et enfant ils sont aussi: le père est le mental, la mère est la parole, l'enfant est le souffle.


En vérité, je connais cet Homme qui est le but suprême de tout soi dont tu parles. Il est Homme fait de désirs. Dis-moi, Sakalya, quelle est sa divinité?
- Les femmes.


Deux chemins ont les mortels, ai-je entendu:
le chemin vers les Pères et vers les dieux.
Par eux passe ensemble tout ce qui bouge
entre le père-ciel et la mère-terre.
(Les Upanisad. Alyette Degrâces. Fayard 2014)


La guerre et le mariage sont intimement liés - en fait les anciens Tupinamba appelaient leurs beaux-frères et leurs ennemis d'un même terme: tobajara, qui signifie, étymologiquement, "ceux qui sont face à face ou opposés". Le commerce et l'échange vont donc de pair avec la guerre et le mariage.
... puisque la couvade comporte une réclusion, et que la réclusion représente l'état de mort, l'homme qui en sort est donc en train de renaître. Par conséquent, la fête [de l'imposition du nom] célèbre l'homme en tant que père, non moins que l'enfant sous l'aspect de Mair.
"Toutes les femmes regardent; elles se dirigent vers [le bourreau] et (...) viennent toutes tenir le pénis, le frotter entre leurs mains. (...) Les femmes le veulent, il leur plaît." (...) Tout s'y passe comme si le bourreau, sorti de sa longue réclusion, récupérait, d'une manière à la fois publique et intime, le pénis dont il n'avait pu se servir durant cette période; et simultanément les femmes le reconnaissent comme leur homme - Homme avec un grand H, qui seul a pouvoir sur les femmes et le monde souterrain et féminin, dont il vient d'émerger en héros.
(Aimables sauvages. Francis Huxley. Plon 1980)


"La société kalash est dédiée "à la gloire des hommes" et les femmes, depuis toujours sont exclues du religieux, du juridique et du politique."
"Il s'en dégage une "incompatibilité" des femmes avec le sacré en général. (...) Cette dualité fondamentale, dressée en rempart d'identité face aux pressions islamiques, apparaît comme un discours culturel mâle qui, s'appuyant sur une nécessaire complémentarité, assigne aux femmes leur place et fixe les contraintes."
"L'âme est censée demeurer auprès de Khodaï-Dieu dans le ciel. Quand Khodaï décide d'une nouvelle vie, une âme descend alors s'accrocher à la colonne vertébrale du futur père. De là, elle est transmise au ventre de la mère au moment de l'accouplement."
Les garçons, théoriquement en robe jusqu'à 7 ans, en situation androgyne, informelle, accèdent par leur premier pantalon à l'adolescence et au monde fabuleux des responsabilités pastorales. S'ouvre aussi à eux le domaine du sacré. Ils peuvent devenir "purifiés", participer aux rituels...
(Solstice païen. Loude, Lièvre, Nègre. Editions Findakly 2007)


C'est un mâle qui tend, qui tire le fil,
un mâle qui l'a tendu au firmament.
Voici les chevilles. - Ils ont pris place sur le siège;
les navettes à tisser, ils en ont fait des mélodies.
"Voilà l'œuvre du Taureau-Vache.
Les dieux ont mesuré à l'aide des noms le compagnon de la Vache."
(Hymnes spéculatifs du Veda. Louis Renou. Gallimard 1956)


Yamï, à laquelle est identifiée la rivière Yamuna, est complémentaire de son jumeau: elle lui est associée, mais en même temps, ou plutôt par une autre façon d'envisager le temps, elle incarne, face à Yama, le désir, la vie, le désir de vie.
Le roi Yama est ainsi appelé parce qu'il fait régner la loi en imposant aux hommes et aux êtres la tension grâce à laquelle les choses "tiennent". Un des textes védiques où cette étymologie est mise en lumière montre Yamï associée à Yama (Yamï, en l’occurrence, étant assimilée à la terre et Yama au feu): "par ces deux, toute chose est tenue". (...) Yama est le modèle du roi. (...) le roi humain rend la justice, c'est-à-dire restaure le dharma en châtiant ceux qui ont pu le léser par leurs transgressions.
"La constellation du frère et de la sœur ou: Ni séparés ni réunis." (Robert Musil)
A la fixité des institutions, point d'appui de Yama, Yamï oppose le dynamisme vital.
(Le jumeau solaire. Charles Malamoud. Seuil 2002)


Le prince occupe la position dominante et ses ministres la position subordonnée ; il en est de même des positions respectives du père et du fils, du frère aîné et du cadet, du vieillard et du jeune homme, de l’homme et de la femme, de l’époux et de l’épouse. Maître et serviteur, premier et second, tels sont respectivement le ciel et la terre.
(Oeuvre complète. Tchouang-tseu. Gallimard 1969)


C’est à la guerre aussi bien qu’à la protection de cette double fécondité, de la nature féminine et de la nature végétale extérieure à l’homme, que les Fravashis entre autres se consacrent.
… la conjonction entre la semence masculine (…) et la terre engendre une plante qui, après plusieurs dizaines d’années, se scinde en des jumeaux siamois, un garçon et une fille, dont le mariage incestueux permet de recréer le monde. (…) ce sont les femmes qui font pousser à l’intérieur des maisons – presque une métaphore du ventre maternel – les semences produites par les hommes.
Les pousses symbolisent finalement une culture féminine dont la consistance, incomplète et stérile, puisqu’elle ne donnera pas de fruits, n’est pas significative en soi, mais par rapport à ce qu’elle permet de valoriser, à savoir la production céréalière masculine (gérée néanmoins par une divinité féminine) dont elles annoncent (ou célèbrent) rituellement le retour.
(Le matin des dieux. Salvatore D’Onofrio. Editions Mimésis 2018)


Tout individu se compose de bodgya (sang) et de kra (esprit). Le sang vient de la lignée féminine, et l‘esprit de la lignée masculine. Cette notion représente la combinaison des éléments mâles et femelles : du sang et du sperme, de l’esprit et du corps.
… j’eus ce sentiment de communauté totale (…) à S., un petit village de France (…). Dans une certaine mesure, la division réelle se fait entre les hommes et les femmes. Les hommes sont en général anticléricaux, les femmes vont à la messe le dimanche…
(La danse de l’araignée. Alexander Alland. France Loisirs 1984)


Les retraites d’excision accentue manifestement, pendant toute leur durée, la valeur reconnue à l’élément féminin de la société. Les masques de la société d’hommes, véritables incarnations de la masculinité, ont l’interdiction absolue de sortir durant cette période.
Les couples sacrés imposent une certaine image de l’homme et de la femme, illustrent les relations prescrites entre ces deux éléments étrangers, bien qu’unis dès l’origine du monde.
(Afrique ambiguë. Georges Balandier. Plon 1957)


Si, par exemple, un jeune Australien devient pubère, des cérémonies d’initiation le transforment en un membre de la société : il modifie d’une certaine manière sa force magique, parce qu’il passe d’une phase où il était assimilé aux femmes à une autre dont l’essence est la virilité (…) à chaque âge de la vie, la continuité et la constance du Moi se renforcent par rapport aux autres âges de la vie ; cette stabilisation circonscrite dans le temps les rendant conscientes et claires. »
(Le monde magique. Ernesto De Martino. Bartillat 2022)


« Selon la cosmologie d’Esna, Khnoum et Neith sont les deux créateurs indissociables, la déesse primordiale ayant fait émerger le monde du chaos, donné naissance au soleil et établi le premier sol où pourra se développer la vie que le dieu va réaliser sur son tour. » (Derchain/Von Recklinghausen)
(Le papyrus des sept propos de Mehet Ouret. Yvan Koening. Institut français d’archéologie orientale 2024)


Maupoil rapportant que, selon ses informateurs, les femmes ont autant d’« âmes » que les hommes, précise cependant qu’elles ont besoin du soutien de celles de leurs époux pour accéder à la pleine existence.
L’omniscience et la pensée créatrice du dieu suprême sont humaines, tout comme Maât, sa fille, qui incarne l’ordre cosmique.
(Corps des dieux. SSLD Malamoud/Vernant. Gallimard 1986)


En descendant de la montagne, les jeunes filles se piquaient traditionnellement des fleurs dans les cheveux affichant ainsi leur toute récente nubilité. (…) [Du côté des garçons, l’équivalent de cette entrée en montagne sous la direction d’un ascète yamabushi, pour en ressortir en « homme fait », prêt à affronter l’autre sexe].
La coutume de se noircir les dents (…) remonte à l’époque de Heian (…). L’application du o-haguro (…) n’était point réservée aux seules jeunes filles jusqu’au Moyen Age, mais intéressait aussi les garçons. C’est à partir de l’époque d’Edo qu’on y voit une coutume plus spécifiquement féminine, qui prend chez les garçons une connotation de pédérastie. D’abord l’apanage de l’aristocratie, la coutume du o-haguro s’était répandue aussi dès le Moyen Age parmi les guerriers. (…) Ceux qui tomberaient sur le champ de bataille montreraient de cette façon leur rang et leur appartenance à une classe supérieure.
(La sieste sous l’aile du cormoran. H.O. Rotermund. L’harmattan 1998)