… le théologème d'une omnivalence féminine doublant la multiplicité des spécialistes masculins (…) les épithètes de Sarasvati (…) la définissent clairement comme pure, héroïque, maternelle (…) le nom complet, triple, d'Anâhita fait évidemment référence aux trois fonctions : « l'humide, la forte, la sans-tache »…
(Mythes et dieux des Indo-Européens. Georges Dumézil. Flammarion)


Les femmes possèdent le contrôle des forces surnaturelles car elles appartiennent au Seigneur du Monde, le Diable, et elles ont des liens avec toute la richesse de l'univers.
Les prêtres donnaient les offrandes à consommer à certains hommes (…). Les malades recevaient ainsi dans leur propre corps la matière de l'offrande (…). Il s'agissait d'hommes contaminés par la force des déesses (…). Etre possédés par l'une de ces maladies signifiait en effet devenir le dépositaire des substances divines.
(Les paradis de brume. Alfredo Lopez-Austin. Maisonneuve et Larose 1997)


… les femmes (…) qui vous regardent mais dont le regard en réalité vous traverse pour se fixer sur celui qui est derrière vous : le démon, l'ange.
(Christophe et son œuf. Carlos Fuentes. Gallimard 1990)


… la « fille de la mer » qui entraîne avec elle, sous la mer, ou dans un lac, l'homme (…) qu'elle a choisi d'aimer. (…) un mythe fort ancien dans lequel la Femme est encore détentrice absolue de la Souveraineté.


… la femme tentatrice et inquiétante parce qu'elle transforme les êtres…
(La tradition celtique. Jean Markale. Payot 1975)


L'histoire de notre plus grand mystère, la légende de la pipe de paix, nous rappelle que lorsque la Femme Bison blanc nous a fait don de la pipe sacrée, elle nous a aussi offert une pierre, rouge et ronde comme la terre, composée du sang vivant de notre peuple.
(De mémoire indienne. Lame Deer et Jean-Jacques Roudière. 2009)


… on reconnaît [les déesses] à leur caractère protecteur et dangereux ; il existe en effet un lien entre elles et les serpents. Isis, par exemple, est à l'origine de la création de l'Elapidé qui mord la jambe de Rê qui lui cause des souffrances intolérables en vue de lui extorquer ses pouvoirs magiques.
(« Dieu » et « dieux » : paradigme naturaliste et septicisme ? Le « faucon » des dieux et le « cobra » des déesses. Sydney H Aufrère. Deus Unicus. Brepols 2014)


Les Germains, écrit Tacite, croient qu'il y a dans les femmes quelque chose de sacré et de prophétique.
(La forêt de Brocéliande. Félix Bellamy. EDR 2016)


... le culte des Mères celtiques, dont on retrouve plein de dédicaces en zone rhénane et ailleurs en Europe.(...) possède la fortune et dispense la fortune celui qui jouit de la protection particulière des Mères.
(Une généalogie des mots. Xavier Delamarre. Errance 2019)


Si tu regardes trop longtemps dans les yeux d’une femme, elle volera ton âme.
(Maunten. Drusilla Modjeska. Au vent des îles 2019)


A l’instar des hommes âgés et des chamanes, les Européens ont la réputation de transmettre leurs pouvoirs aux jeunes hommes en couchant avec leurs épouses, qui sont les médiatrices de la puissance spirituelle. (…) Ils s’assemblent dans la « grande cabane » centrale du village, un bâtiment de 50 mètres de circonférence pouvant accueillir jusqu’à 500 ou 600 personnes.
(L’Amérique fantôme. Gilles Havard. Flammarion 2019)


Ici, le feu n’est pas transmis par les femmes, qui en gardent jalousement le secret. La vulve, détentrice de ce secret, reste fermée, à la différence des versions africaines où le don du feu « libère » la vulve et permet l’union des hommes et des femmes. (…) faute de transmission de l’information, le passage à la culture reste incomplet, conduisant à la mort des femmes et à la régression animale des hommes.
Les donneurs et les preneurs de femmes s’opposent sur l’axe de la vie sociale, comme la terre s’oppose au ciel sur l’axe du monde. Or le feu trouve son origine au ciel et son réceptacle obligé se situe du côté de la terre (…). Parce que la femme sert de médiatrice entre les groupes humains par son intégration dans un système d’échanges et d’alliances matrimoniaux, il lui revient aussi, selon le mythe, d’assumer cette fonction entre la terre et le feu, et donc de s’occuper du foyer.
… quand elles entendirent les hommes chanter et cogner les bâtons de chant, elles craignirent la puissance des rituels que les hommes leur avaient dérobés (…)
Au moment de devenir femmes, elles étaient initiées par leurs pairs à l’art de la magie, apprenant comment apporter la maladie et la mort à ceux qui leur déplaisaient. Aussi les hommes vivaient-ils dans une peur et une soumission permanentes.
(Cosmogonies. Julien d’Huy. La Découverte 2020)


Si le berger se mariait avec la Saurimonde, il devenait le mari d’une sorte de diable…
Tantôt elles font danser jusqu’à ce que mort s’ensuive, celui qui s’est laissé prendre à leurs agaceries, tantôt elles le poussent pour le faire tomber dans l’eau, tantôt les charmantes jeunes filles se transforment en horribles bêtes.
Les soldats de la Vendée (...) avaient une sorte de considération superstitieuse pour certains canons. (...) Ils parurent même, en certaines circonstances, regarder quelques [pièces d'artilleries] comme des espèces de fétiches (...) ils la ramenèrent [un canon nommé Marie-Jeanne] sous le drapeau fleurdelisé, en la couvrant de fleurs et en la faisant baiser par les femmes qui passaient.
(Croyances, mythes et légendes des pays de France. Paul Sébillot. Omnibus août 2002)


La raison d'être d'un "abaton" est de circonscrire, de contenir la puissance d'une entité. (...) Les divinités qui possèdent l'endroit sont en définitive les déesses de l'effroi, filles de la Terre et du brouillard.
"... le bois interdit des jeunes filles invincibles dont nous tremblons de prononcer le nom, et près desquelles nous passons sans regard, sans voix, sans parole, en n'usant que d'un langage, celui du recueillement." (Sophocle)
... si l'antre de Phigalie sert d'abri à Déméter la Noire, les gracieuses nymphes sont honorées dans une grotte obscure à Pirsa, tandis que les jeunes filles Invincibles, terribles déesses dont on hésite à prononcer le nom, occupent un bois charmant peuplé de rossignols à Colone.
Le son de la "salpinx" s'accorde volontiers à la clameur guerrière, éventuellement au fracas des boucliers entrechoqués avec les lances pour se donner du courage: il annonce le déchaînement de la violence à venir et galvanise les troupes: on vénérait d'ailleurs une "Athéna Salpinx" à Argos (...) déesse tonitruante s'il en est.
... les images témoignent du fait que la transe résulte surtout des effets de la musique, des percussions, des cris, de la danse. (...) Il existe selon Françoise Frontisi une distinction clairement genrée: pour les Grecs, la nature féminine, déjà humide, n'a pas besoin de vin pour se laisser envahir par Dionysos.
(Au plaisir des dieux. Adeline Grand Clément. Anacharsis 2023)


Dans certaines cités auraient même oeuvré des putains considérées comme "sacrées" ...
La poitrine de Phryné révèle une présence divine. Impossible dès lors de condamner à mort cette idole vivante de la beauté, sans risquer d'offenser la déesse qui en est l'inspiratrice céleste.
(Débauches antiques. Christian Georges Schwentzel. Vendémiaire 2023)


... un chevalier y est sommé, sous peine de mort, de répondre à la question de savoir ce que désirent réellement les femmes. Une vieille femme laide lui révèle ce qu'une femme désire par-dessus tout, c'est la souveraineté et le pouvoir sur son mari. (...) un rite préhistorique répandu, à travers lequel l'autorité de la royauté sacrée se trouvait confirmée, et qui consistait en l'offrande d'une boisson par une femme au statut particulier.
Elles détenaient peut-être un don exceptionnel dans leur capacité de valider l'autorité d'un souverain. Ni déesses ni conjointes, mais investies d'un pouvoir surnaturel faisant écho délibérément ou dérivé d'une figure de la souveraineté, ces ritualistes avaient pour principale fonction de légitimer la domination et le pouvoir masculins.
... les eaux de la rivière (...) provenaient de la déesse elle-même, émanant littéralement de son corps divin.
(L'archéologie et la mythologie celtique. John Waddell. Sidestone 2022)


Elles essayèrent de nous embrasser sur la bouche, mais celui qui recevait ce baiser était immédiatement pris d'ivresse et se mettait à tituber. (...) Certaines désirèrent même s'unir à nous; deux de nos compagnons s'étant approchés d'elles, ne purent s'en détacher: ils restèrent attachés par le sexe. Ils se fondirent à elles et prirent racine avec elles. (Lucien)
(Utopia. Jean-Louis Poirier. Les belles lettres septembre 2022)


... s'ils tiennent compte de la fertilité différentielle des sols, les Indiens affirment aussi que la durée de vie et la productivité d'un jardin sont autant fonction des aptitudes magiques de la femme qui le travaille que des contraintes écologiques locales.
Lorsqu'une femme joue le personnage de Nunkui dans un "anent", elle opère donc une mise en scène visant au captage des attributs de l'esprit tutélaire, tout en sachant pertinemment que leurs deux essences restent distinguées et que Nunkui ne vient pas s'incarner en elle.
En s'identifiant à Nunkui et en détournant une partie de l'autorité maternelle que celle-ci exerce sur les plantes cultivées, les femmes se représentent leur jardin comme un univers où règne la connivence de la consanguinité. Le peuple du manioc se constitue en enfant paradigmatique...
En s'identifiant à Nunkui, la femme achuar s'approprie de façon putative la relation de maternité entre Nunkui et les plantes cultivées. Nunkui n'est donc pas une terre-mère auprès de laquelle il faudrait quémander des fruits, mais le rapport social qui vient constituer le jardin en un univers de consanguinité.
Pour que la chasse soit possible, il faut donc trouver un modus vivendi avec ces "mères du gibier" et former avec elles une entente tacite.
La liaison postulée entre une femme et Nunkui étant fondamentalement un rapport d'identification, la relation qui s'établit entre cette femme et les plantes qu'elle cultive doit être conçue comme un doublet du rapport de maternité que Nunkui entretient avec ses enfants végétaux. Il en est tout autrement pour la chasse, dont l'effectivité est fondée sur l'interaction de trois éléments: l'homme, les truchements ("mères du gibier" et "amana du gibier") et les animaux chassés. Le rapport de connivence et de séduction que le chasseur entretient avec les truchements est très similaire à celui qui prévaut dans ses relations avec les beaux-frères animaux. Par ailleurs, et à l'inverse du jardinage, la menace cannibale ne provient pas des êtres que l'on consomme, mais de leurs protecteurs, qu'il est donc impératif de ménager. Comme on l'a vu, certains de ces protecteurs ont, à l'égard de leur troupeau animal, une attitude très ambiguë, en ce que leur maternité est littéralement dévorante. (...) alors que Nunkui est un paradigme auquel on s'identifie, les truchements sont des intermédiaires avec lesquels on négocie.
(La nature domestique. Philippe Descola. Editions de la Maison des sciences de l'homme 2019)


... la bonne marche de l'univers appelle inexorablement l'anéantissement du sexe masculin, une "coupure" au contact de l'élément féminin qu'il fécondera. C'est en cela que les morts sont des êtres impuissants, émasculés, tels ces vieux ridés que nous dépeint la geste carnavalesque. Mais "coupure", dans l'acceptation otomi du terme, ne signifie pas disparition définitive. (...) les défunts, une fois revitalisés par l'absorption de nourriture, fertiliseront à nouveau l'univers.
(La moitié du monde. Jacques Galinier. PUF 1997)


Apparemment donc, la force mauvaise du bayja n'est libérée que dans les circonstances où la féminité fait irruption à la fois en sa vie biologique individuelle et en la vie sociale du groupe. (...) c'est dans et par l'espace du rituel que l'ordre naturel se convertit en ordre culturel.
La pesanteur symbolique de la femme, éprouvée comme menace par les hommes, tend à oblitérer l'existence de celui auquel on oublie de penser parce qu'il est trop présent, l'enfant.
... l'espace masculin se trouve contaminé, affaibli, dégradé par le contact avec l'espace féminin. (...) C'est toujours les hommes qui subissent les conséquences. (...) telle est la puissance de la femme, qu'elle est maléfique aux hommes. (...) On ne peut être homme, dirait-on, que contre les femmes. Abolie cette distance et franchie la limite, alors se produit une contagion qui fait l'homme perdre sa qualité, sa masculinité s'effrite: il tombe dans l'espace des femmes.
Est-il absurde de décocher des flèches sur la nouvelle lune, lorsqu'elle glisse par-dessus les arbres? Pas pour les Aché: ils la savent vivante, son apparition dans le ciel fait jaillir chez les kuja le sang menstruel, source possible de malchance pour les chasseurs. Ils se vengent, le monde n'est pas inerte, il faut se défendre.
(Chronique des Indiens Guayaki. Pierre Clastres. Plon 1972)


Viraj est un principe actif (à la fois lumineux et dominateur) féminin (...). C'est une force cosmique au niveau grossier par rapport à l'embryon d'or...
Ainsi il fendit le sommet de la tête et entra par cette porte. Cette porte est appelée "fente" et c'est le plaisir céleste.
(Les Upanisad. Alyette Degrâces. Fayard 2014)


Aé habitait sous terre; on accédait à son village par le petit trou d'une fourmilière semblable à celle de la fourmi tô-ô, qui vit exclusivement dans les endroits venteux. Grâce à une tache de sang, les gens du village avait repéré cette entrée.
(Aimables sauvages. Francis Huxley. Plon 1980)


"Tous les problèmes sont égarés dans le vagin." (...) ils s'approchent des femmes qui se sont accroupies, les encerclent et lancent le cri fameux: "wahahaha..." Ils s'enroulent en spirale autour d'elles de gauche à droite. Le moment se traduit gravement sur les visages. Tous chantent l'hymne du "bélier sans corne". Les deux "mystères" sont visibles: les femmes se serrent dans l'enclos des épaules mâles. L'enceinte des hommes protège leur chœur qui forme une pleine lune.
Cette pratique concerne les fillettes jusqu'à l'âge pré-pubertaire de murayak (onze-douze ans) (...). Il s'agit d'étouffer toute potentialité maléfique en elles, futures génitrices, de chasser définitivement la part maudite de la mère dévoreuse, de détruire la "sorcière"...
"Au lieu de nourrir, procréer, apporter la prospérité", conclut Véronique Bouiller à propos des fêtes féminines dans les hautes castes indo-népalaises, les sorcières "s'insinuent dans leurs victimes, et les rongent de l'intérieur, les font mourir par consomption. Et cette activité de mort s'exerce plus volontiers au sein de la famille conjugale, chez ceux que la femme est censée enrichir par les enfants qu'elle met au monde."
"Elles avaient l'habitude de se réunir, toutes, sous un mûrier et là, elles transformaient chacune à leur tour leur fils en bouc. Ou plutôt en "image de bouc" qu'elles dévoraient. Le lendemain, l'enfant mourait pour une raison quelconque."
(Solstice païen. Loude, Lièvre, Nègre. Editions Findakly 2007)


Elle, la purifiante, qui fut le serpent,
sur laquelle sont les feux à l'intérieur des eaux,
elle qui livre les démons, les insulteurs des dieux...
(Hymnes spéculatifs du Véda. Louis Renou. Gallimard 1956)


Elle était là, debout, resplendissante, rayonnante, scintillante, les Dieux ne purent détacher d'elle leurs pensées. (...) Agni donc lui ravit la nourriture, Soma la royauté, Varuna la souveraineté, Mitra le pouvoir temporel, Indra la force, Brhaspati la gloire brahmanique, Savitar l'empire, Pusan la fortune, Sarasvati la richesse, Tvastar la beauté.
(Mythes et légendes extrait des Brâhmanas. Jean Varenne. Gallimard 1967)


Les « tjimbarkna » sont des démons femelles (…) vécus dans la nuit : elles emprisonnent l’âme de la victime avec un fil, puis elles s’éloignent. L’homme dont l’âme est ainsi prise tombe malade et maigrit à vue d’œil. La nuit suivante, les tjimbarkna reviennent et tirent légèrement sur le fil : alors le malade se lève et peut marcher un peu. Mais la troisième nuit, elles tirent le fil brusquement et la victime meurt.
(Le monde magique. Ernesto De Martino. Bartillat 2022)


Neith est considérée tantôt comme étant la mère de Rê, tantôt comme étant sa fille …
(Le papyrus des sept propos de Mehet Ouret. Yvan Koening. Institut français d’archéologie orientale 2024)


[Les « filles de jade des décades ding »] peuvent se transformer en pourvoyeuses de vie pour qui sait manipuler le temps en profitant de la faille du cadran de la temporalité dû à l’inégalité des deux séries de signes, dénaires et duodénaires. Par cet interstice (…), il sera possible d’échapper au devenir en se cachant dans cette plage de la temporalité sans épaisseur ni réalité.
(Corps des dieux. SSLD Malamoud/Vernant. Gallimard 1986)


La forêt de Shinoda est située près du sanctuaire Kuzunoha Inari jinja. D’après la légende, une renarde blanche y aurait vécu, se serait transformée en femme et aurait eu à Kyôto une liaison avec le maître du Yin et du Yang, Abe no Yasuna, union d’où serait né l’illustre Abe no Seimei. Or, la femme renarde, une fois sa vraie nature trahie, disparaît en laissant un poème d’adieu (…). L’enfant ira à la rencontre de sa mère dont il obtiendra les moyens lui permettant de devenir plus tard le célèbre maître de la voie du Yin et du Yang ...
(La sieste sous l’aile du cormoran. H.O. Rotermund. L’harmattan 1998)