… le corps de l'homme est créature de l'espace, et qu'il n'en finit pas, semblable à tout autre corps, d'habiter un vaste creux du vide, de quel côté que ses pieds l'entraînent, semblable à tout autre corps céleste, sans autre marque d'origine que la trace volatile d'incessantes transmigrations, voilà tout.
(Solo d'un revenant. Kossi Efoni. Seuil 2008)


Le vrai domicile de l'homme n'est pas une maison mais la route, et la vie elle-même est un voyage à faire à pied.
(Bruce Chatwin. Qu'est-ce que je fais là?)


Le Texas n'a jamais appartenu aux Américains : c'était un territoire comanche ! La nation comanche est une nation qui bouge, qui unit, qui s'approprie la terre en la parcourant.
… nous sommes toujours dans une situation de passage de frontière, sur le point d'entrer ou de sortir…
(Christophe et son œuf. Carlos Fuentes. Gallimard 1990)


Nous pouvons aussi mourir lorsque des gens très lointains (…) flèchent nos doubles animaux (…) Ces doubles animaux, qui sont aussi ceux de nos ancêtres, vivent dans la forêt auprès de gens inconnus sur le haut rio Parima, autour d'une grande cataracte nommée Xama xi pora, protégée par d'innombrables nids de guêpes et les bourrasques d'un vent très puissant. (…) Notre véritable intérieur se trouve là-bas, à très grande distance de notre peau qui seule est présente, étendue dans notre hamac !
(La chute du ciel. Davi Kopenawa. Plon 2010)


… communautés indiennes entières suivant leurs « hommes-dieux » vers la « terre sans mal », dans laquelle on ne meurt plus, où il n'y a plus de travail, et se livrant à la folie d'une danse perpétuelle, qui les allégerait jusqu'à pouvoir s'envoler, passer les rivières comme des oiseaux…
(La religion des Tupinamba. Alfred Métraux Puf 2014)


L'homme ou l'animal qui marche et laisse sur le sol l'empreinte de son pied, y fait passer quelque chose de lui-même, qui participe de lui comme le fait son image.
(L'expérience mystique et les symboles chez les primitifs. Lucien Lévy-Bruhl. Dunod 2014)


 … l'homme est libre de se déplacer en permanence sur une trame spatiale statique, alors qu'il ne peut échapper au mouvement perpétuel de l'univers dans des cycles temporels sans fin.
(Le premier empire des steppes en Mongolie. Pierre Henri Giscard. Faton 2013)


… nous passons notre vie à chercher le souffle perdu. Nous le cherchons au fond de la mer et sur les plus hautes cimes des montagnes.
Du lointain où il se trouve, Brahma sourit.
(Le chasseur d'histoires. Eduardo Galeano. Lux 2017)


L'égarement fait partie du chemin.
(Trio pour un monde égaré. Marie Redonnet. Le Tripode)


Je viens du pays des sans-pays. Je suis avec ceux qui traînent leur passé comme une caravane. Je suis du côté des marcheurs, des rêveurs, des colporteurs, des bringuebalants.
(En camping-car. Ivan Jablonka. Seuil 2018)


Je ne savais pas où était ma place; mais l'inconfort qui en découlait s'évanouissait au contact de la terre et de l'herbe, à l'écoute du chant des oiseaux dans les branches et des cris des bêtes au loin. Seules mes promenades en solitaire me donnaient un sentiment d'appartenance au monde.
(Une forêt de laine et d'acier. Natsu Miyashita. Stock 2018)


… plutôt qu’un paysage ethnique figé, clairement compartimenté en un nombre réduit de « nations », on observe un enchevêtrement de communautés indépendantes, en flux constant et aux alliances aussi variées que changeantes.
(L’Amérique fantôme. Gilles Havard. Flammarion 2019)


Les gens ici habitent un seuil. Ils sont sans attache, de grands solitaires qui se déplacent d’un lieu à l’autre. Gens de passage du milieu, de l’entre-deux. (…) chercheurs de passages, le plus souvent arrêtés sur un seuil, en quête d’un lieu acceptable. Gens des limes, des lisières, fondamentalement dans l’errance, parce qu’il n’y a pas pour eux de retour au centre.
Faut-il donc se résigner à rester à la place qu’on vous alloue ?
« … l’homme marche, navigue, ils se sont tous éparpillés sur la terre, multipliant le chemin et l’itinéraire, de sorte que tu es chez toi là où tes pieds te portent. J’ai dans l’idée que la nation, c’est la plante de mes pieds. » (Emile Yoyo 1978)
Pour moi cet endroit est une piste grande ouverte, plein de gens sont déjà passés par là, des gens autant que des animaux, depuis que ces bois sont bois !
S’il fallait mettre ensemble tous ceux qui connaissent exactement l’endroit où nous sommes assis, Bonis, Indiens, Créoles, eh bien on aurait une ville ici ! (…) Il n’y a pas de forêt vierge !
(Les gens de l’or. Michèle Baj Strobel. Terre humaine 2020)


Nous pourrions dire que l’un [l’idéogramme chinois qui représente l’homme] est dans le mouvement de la vie : il est vivant et il marche vers sa destination. L’autre [le pictogramme occidental qui représente l’homme], immobile, est en représentation, en énergie rassemblée, comme en attente de consigne, occupant la place qui lui a été donnée.
(Marie-Pierre Dilenseger. Natives printemps 2021)


La maison n'est donc pas l'appendice d'un territoire socialement défini et géographiquement délimité, se perpétuant dans son bornage et sa substance génération après génération; elle est, au contraire, le centre périodiquement déplacé d'un réseau de parcours de la forêt, le foyer temporaire à partir duquel se réalise l'usage de l'espace environnant.
(La nature domestique. Philippe Descola. Editions de la Maison des sciences de l'homme 2019)


La carte autochtone est donc polymorphe et métamorphe puisque fondée sur le parcours. Le chemin arpenté, et non pas la barrière ethnique, dessine la patrie. (…) Loin du concept occidental focalisé sur les marqueurs immobiliers, leur science cartographique conçoit un paysage dynamique bouillonnant de vie. Leurs cartes indiquent ainsi les espaces de terres noires fertiles utiles à l’agriculture, les coins à poissons, lieu d’abreuvement des animaux, les plantes utiles, les sources de sel, gisement d’argile colorante ou pour la poterie, etc.
Le déplacement des espèces exotiques vers la forêt et d’espèces amazoniennes vers d’autres régions d’Amérique du Sud prouve l’existence de réseaux de mobilité qui ont relié les populations au début de l’Holocène à l’échelle continentale (Piperno et Pearsall 1998). L’interconnectivité au sein de l’Amazonie est attestée par les extensions géographiques atteintes par les arbres utiles depuis le Pléistocène.
(Archéologie de l’Amazonie. S. Rostain C. J. Betancourt. Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme 2025)


Le nom du peuple Andes mentionné seulement par César suggère qu’il aurait pu faire partie du même type de migration que celle des Vénètes (du Morbihan) et celle des Cénomans (de la Sarthe) dont on retrouve les noms à la fois en Italie du Nord et en Armorique. Dans l’état actuel de la recherche, ces migrations, et leur provenance probable d’Europe centrale, pourraient dater du IIIe siècle av. J-C ?
Au sujet de la première mention du site [Sermaise en Anjou], (…) en 1060 selon le Cartulaire de Saint-Aubin (…), C. Port pose la question d’une colonie de Sarmates installés par les Romains (?).
(Carte archéologique de la Gaule. Le Maine-et-Loire. Provost Leroux. Académie des Inscriptions et Belles-Lettres. 2025)